Changer l'eau des fleurs, Valérie Perrin. LGF, 04/2019. 664 p. 8,90 *****

Violette Toussaint est gardienne de cimetière dans une petite ville de Bourgogne. L'équipe des fossoyeurs, les trois frères entrepreneurs de pompes funèbres, le curé et des habitués parfois se retrouvent régulièrement dans sa cuisine et racontent des petits riens, des choses de la vie, des émotions. Elle écoute tous ses visiteurs, entretient son petit potager, change l'eau des fleurs et se rappelle son passé : sa rencontre avec Philippe Toussaint, devenu garde-barrière à ses côtés, son mariage, la naissance de sa petite Léonine, son soleil dans une vie difficile avec un mari inconsistant et infidèle...

         Née sous X, Violette est passée de famille d'accueil en famille d'accueil. Elle pense trouver un point d'ancrage quand elle rencontre le très beau et convoité Philippe Toussaint. Mais Philippe Toussaint ne cesse d'aller "faire un tour" et néglige sa jeune femme, qui reporte son affection sur sa petite fille. Elle aurait de quoi être amère, Violette, mais elle est au contraire d'une profonde humanité, malgré une vie bien dure. La rencontre avec Sacha, dont elle va prendre le poste au cimetière de Brancion-en-Châlon, est décisive et l'ancre dans une identité qu'elle ne quittera plus et lui donnera la force de continuer. Autour de ce personnage que j'ai envie de qualifier de résilient, qui aime tant l'odeur des roses, adopte chats errants et animaux orphelins après la mort de leur maître, et tient un registre détaillé des obsèques de chacun, gravite une galerie de portraits attachants – je pense notamment à Gaston, si maladroit qu'l lui est arrivé de tomber dans la fosse qu'il venait de creuser, ou évidemment à ce Julien Seul qui débarque un jour pour réaliser les dernières volontés de sa mère, qui a demandé à ce que ses cendres soient déposées sur la tombe de son amant – et se construit une histoire en patchwork dont l'unité se fait progressivement, avec même une touche de roman noir. C'est très réussi, et, ce qui ne gâche rien, écrit dans une langue fluide et élégante. On donnerait cher pour rendre visite à ses morts veillés par une telle gardienne.

 

Catégorie : Littérature française

famille / deuil / cimetière / amitié /


Posté le 12/02/2021 à 10:56