2023/9 L’indélicatesse, Erik Martiny. Le Passage, 01/2023. 247 p. 19 € ***

Xavier Bovary est dermatologue. Praticien sans histoire, un peu terne, il vit sous la coupe de son épouse Anastasia, plus jeune que lui et très belle, se dévouant à son métier et à ses enfants. Le jour de ses 50 ans, il reçoit des mains du notaire un pli scellé, qui vient de son grand-père décédé vingt ans plus tôt. Dans le paquet, un vieux pistolet chargé, sans aucun document d'accompagnement. L'objet le propulse dans le passé, fait remonter les souvenirs de cet aïeul qu'il aimait beaucoup, et l'amène à reconsidérer toute sa vie, en particulier sa relation avec son épouse, devenue de plus en plus distante au fil des années.

Dans les remerciements, l’auteur rend hommage à ses grands-parents qui ne lui ont, écrit-il, jamais offert de cadeau empoisonné. C’est effectivement ce que Xavier a hérité de son grand-père : une arme, ancienne certes, mais toujours fonctionnelle, chargée de 5 balles. Où est passée la sixième cartouche ? A-t-elle été utilisée, et à quelles fins ? La question ne va pas tarauder longtemps notre dermatologue, qui va convoquer le ban et l’arrière-ban de ses ancêtres, dont le propriétaire du flingue, électricien de son état, son épouse entièrement vouée à la tenue de la maison et sous le joug d’un mari irascible ; les arrière-grands-parents maternels, et cætera. Nous avons déjà passé le premier tiers du récit, dont le narrateur s’excuse envers ses lecteurs – ses enfants, comprend-t-on assez vite – de ses « détours dilatoires ». On acquiesce : allez Xavier, au fait. Mais non, le carton des grands-parents recèle encore de nombreux souvenirs que Xavier n’en finit pas d’égrener. Nous voici rendus à la moitié, le revolver est baptisé du prénom du grand-père, et il est enfin question d’Anastasia, dont le mari est assez lucide que ce ne sont ni sa beauté ni son charisme qui ont décidé la belle jeune femme à l’épouser. Un constat qui va amener doucement notre praticien à commettre l’irréparable.

Malgré quelques pages assez drôles au début du récit sur quelques patients de Xavier Bovary, et une judicieuse exploitation de sa déformation professionnelle qui le fait analyser la personnalité de chacun en examinant son grain de peau, le récit traîne en longueur, la faute à ces « détours dilatoires » dont abuse le narrateur. Cependant, le personnage est bien campé, en faux gentil qui se révèle férocement vengeur et ne supporte pas l’indélicatesse.

 

Catégorie : Littérature française

couple / adultère / jalousie / vengeance / dermatologie / peau /


Posté le 15/03/2023 à 17:35