Des hommes couleur de ciel, Anaïs Llobet. Les éditions de l'Observatoire, 11/2018. 210 p. 17 € *****

Alissa enseigne le russe dans un lycée de La Haye. Afin de parfaire son intégration, elle a tu ses origines tchétchènes. Un attentat a lieu dans son établissement, qui fait 24 victimes : Kirem, l'un de ses élèves, Tchétchène lui aussi, un adolescent renfermé et hostile, est suspecté, ainsi que son frère Oumar.

Le roman alterne les chapitres mettant en scène Alice-Alissa, qui porte ses origines comme un fardeau dont elle voudrait tant se défaire, Oumar qui sous le nom d'Adam parvient à vivre son homosexualité, malgré le risque d'être découvert, banni et probablement tué par les siens qui ne lui pardonneraient pas d'avoir ainsi sali la famille. Il donne aussi voix à Alex, qui a rencontré si brièvement Adam, et ne peut croire que le beau jeune homme au regard doux soit le responsable de la barbarie dont on l'accuse, et à Kirem, à travers les rédactions écrites en tchétchènes qu'il rend à sa professeure.

Ce roman polyphonique, d'un réalisme glaçant, évoque le problème du déracinement, et la difficile intégration dans la société occidentale. S'intégrer, est-ce renoncer à son identité ? Renier son passé ? A travers le personnage d'Adam-Oumar, il traite aussi de la force des préjugés : si l'homophobie n'est pas de mise en Hollande, elle sévit encore durement dans la communauté d'Oumar, considérée comme une perversion occidentale passible de mort, au point qu'il doive leur sacrifier sa liberté. Ces problématiques, ainsi que celle de la guerre et de l'endoctrinement, font de ce roman un reflet très juste et inquiétant de notre société multiculturelle contemporaine.

 

Roman lu dans le cadre des "68 premières fois"

 

Catégorie : Littérature française

Homophobie / immigration / famille / terrorisme /


Posté le 27/03/2019 à 10:02