2023/15 Les dévorés, Thibaut Solano. Robert Laffont, 01/2023 (La Bête noire). 351 p. 20,50 € ****

         Clermont-Ferrand, fin 2018, en plein mouvement des Gilets jaunes. On retrouve le corps d'un professeur sans histoire dans le coffre de sa voiture. Simon Magny, journaliste à "L'Eclair", et son photographe suivent l'enquête. C'est alors que la fille de sa nouvelle compagne disparait à la piscine. Elle est retrouvée peu de temps après, choquée, mais incapable de raconter ce qui lui est arrivé. C'est ensuite une autre petite fille qui disparaît, en plein marché de Noël. Simon et Martin suivent des pistes en parallèle de la police, sur les traces d’une mystérieuse voiture noire…

         Un roman policier original dans les choix faits par l’auteur de situer son histoire dans une ville moyenne du centre de la France, que l’on découvre en suivant les pas des deux journalistes, de ne pas mettre en scène des professionnels d’enquête criminelle, et de présenter des personnages bien caractérisés. Efficace.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Auvergne / journaliste / manifestation /


Posté le 30/03/2023 à 14:03

2023/13 Une saison pour les ombres, R.J.Ellory / trad. de l’anglais. Sonatine, 01/2023. 398 p. 25 € ***

Jasperville, nord-est du Canada, 1972. Les habitants travaillent dans les mines de fer, et vivent dans des conditions très difficiles, dans un froid glacial, un hiver qui dure huit mois et un environnement hostile où règnent les ours et les loups. On impute la mort d'une jeune fille retrouvée déchiquetée près de la forêt à une bête sauvage, et l'enquête se clôt. Mais le corps d'une deuxième jeune fille portant des blessures similaires vient démentir la version officielle, même si personne ne la remet en cause. Vingt-six ans plus tard, Jack Devereaux revient dans son village natal pour prêter main forte à son frère accusé d'agression sur un homme qu’il soupçonnait être le meurtrier des deux jeunes filles. Son retour fait ressurgir des souvenirs, et amène Jack à mener une enquête officieuse sur ces deux décès, en s'inspirant des notes prises par son frère à l'époque...

Que univers terrible que celui que peint l’auteur ! Comment fait-on pour accepter de vivre – de survivre – dans de pareilles conditions ? Même Jack se pose la question, d’autant plus qu’il doit également replonger dans son passé, composer avec la culpabilité de s’être enfui en laissant son frère aux soins d’un père démissionnaire et alcoolique, et son amour de jeunesse. Ce poids est le filigrane d’un récit qui prend son temps pour instiller cette ambiance délétère, sur fond de légende amérindienne avec, peut-être au bout, quand il a terminé sa quête, une forme de rédemption.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / mine / froid / famille /


Posté le 30/03/2023 à 13:59

2023/03 Coupez !, Chris Brookmyre / trad. de l’anglais. Métailié, 03/2022 (Noir). 510 p. 22,50 € *****

Millicent Spark, 72 ans, sort de prison après 24 années d'emprisonnement. A l'époque, accusée du meurtre de son amant, elle n'a pas pu prouver son innocence. Hébergée par la sœur de l’ancien mari de son propre frère, récemment décédé, elle fait la connaissance de leur nouveau colocataire, Jerry, un jeune passionné de série B, qui nourrit une véritable fascination pour Mancipium, un film dont toutes les copies ont été perdues, sur lequel Millie a travaillé en tant que maquilleuse spécialiste des effets spéciaux de films d’horreur. La découverte d’une photographie dans le hall d’un hôtel ravive la douleur d’il y a 24 ans et va la décider à s’embarquer dans la quête de la vérité : qui était vraiment son amant ? Pourquoi essaie-t-on de l'assassiner à son tour ? L'ancienne maquilleuse et l'étudiant en cinéma s’allient pour semer leurs poursuivants…

Quel duo hautement improbable que celui-là, qui réunit une vieille dame qui méconnait l’usage des téléphones portables et compense les dégâts de ses années de détention par un caractère acariâtre et provocateur, et un jeune homme orphelin et fauché, mal à l’aise dans son école trop chère pour sa condition sociale ! Jerry doit rendre une dissertation, et sa rencontre avec Millie va lui permettre, espère-t-il, de réunir le matériau suffisant pour rédiger un travail suffisant et rattraper ses derniers échecs. Finalement, une photo en décide autrement, et l’amène bien malgré lui à venir en aide à sa colocataire. La dissertation attendra, tandis que nous entrons dans le monde pas toujours très glamour de la production cinématographique du gore où gravitent starlettes prêtes à tout pour un rôle, acteurs blasés, producteurs véreux et financements pas très nets. Le récit est habilement mené, entre flash backs de Millie et road movie truffé de rebondissements d’un duo de plus en plus complice, aux personnalités savamment exploitées.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

cinéma / production / acteur / effets spéciaux / chantage /


Posté le 15/03/2023 à 17:30

2022/102 Angélique, Guillaume Musso. Calmann Lévy, 08/2022. 309 p. 21,90 € **

Après un accident cardiaque, l’ancien flic Mathias Taillefer est hospitalisé. A son réveil, il découvre une jeune fille à son chevet. En deuxième année de médecine à seulement 17 ans, Louise Collange fait partie d'une association de musicothérapie et joue du violoncelle. Louise a perdu sa mère dans un suicide ou un accident, mais récuse la version officielle et demande à Mathias de retrouver son meurtrier. Face à son insistance et à son obstination, il finit par céder et se lance dans une enquête sur fond de pandémie.

La première moitié du roman fonctionne plutôt bien, d’abord avec ce duo un peu improbable, puis avec deux autres personnages avec lesquels on fait connaissance : Stella Petreko la danseuse étoile puis Angélique Charvet l’infirmière. Puis tout dérape, le roman enchaîne les péripéties, les personnages deviennent de plus en plus excessifs, de moins en moins crédibles, le récit part dans tous les sens et se rattrape aux branches d’une narration construite sans grand souci de logique ou de véracité. On en sort comme d’un repas commencé avec appétit mais dont les mets trop copieux et trop épicés vous restent sur l’estomac.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

danse / jalousie / chantage / ambition /


Posté le 06/11/2022 à 11:38

2022/101 Aux vents mauvais, Elena Piacentini. Pocket, 06/2018. 342 p. 7,70 € ****

On retrouve un corps dans une maison promise à la démolition. Le commandant Leoni et son équipe font le lien avec la disparition inexpliquée de Jessica, 17 ans, qui vivait en foyer. Tandis qu’il se lance dans cette enquête, il s’inquiète pour Thierry Muissen, son adjoint qui a disparu de la circulation. En parallèle, le récit nous fait suivre Rémi, un ado confié par ses parents dépassés à sa grand-mère, une retraitée qui espionne son nouveau voisin, et Jean-Toussaint, arraché à sa Mamilouise pour, à l’instar de nombreux enfants réunionnais dans les années 60, être envoyé repeupler les campagnes françaises. Placé chez un paysan creusois, il n’a de cesse de retrouver Marie-Eve, sa compagne d’infortune qui est employée comme bonne à tout faire.

Un récit complexe, aux multiples intrigues, mais dont les personnages, nombreux, ne peuvent qu’attirer la sympathie du lecteur, dont les grand-mères : mémé Angèle pour Leoni, Mamilouise pour Jean-Toussaint et celle de Rémi, une ancienne prof de maths que son petit-fils  surnomme Pythagore. Et puis ces destins entrecroisés, ces coups que porte la vie, le rapt de ces enfants réunionnais, l’enfance volée de Muissen, les jeunes filles assassinées, et, malgré tout, l’amour, celui des grands-mères et celui qui lie Leoni à Eliane, la médecin légiste. Comme une lueur à l’horizon un après-midi, dans la morosité ambiante.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Réunion / campagne / Nord / famille /


Posté le 06/11/2022 à 11:37

2022/87 Glacé, Bernard Minier. Pocket, 05/2012. 725 p. 8,75 € *****

Dans une vallée encaissée des Pyrénées, on découvre le corps décapité d'un cheval magnifique appartenant à un richissime homme d'affaires, pendu en haut d'un téléphérique. Il s'agit d'un jeune pur-sang appartenant à un richissime homme d'affaires qui possède un château et un haras dans la région. Le lieu est situé à proximité d'un asile psychiatrique où sont surveillé de dangereux psychopathes venus de toute l'Europe. Le milliardaire obtient grâce à son entregent la mise en place d'une enquête dont le commandant Martin Servaz est chargé, en collaboration avec Une enquête est diligentée Alors que le commandant de police Martin Servaz se voit confier l'enquête, en collaboration avec la gendarmerie, une jeune psychologue prend son premier poste dans l'asile. Au sein du village, deux meurtres ont lieu, les deux par pendaison. Ces deux victimes ont-elles un lien avec le massacre du cheval ?

Glacé, c'est le terme qui convient à ce thriller qui frôle les 2000 mètres d'altitude, alors que l'hiver commence à étendre son emprise sur la région. Il fait froid et sombre, à frissonner et claquer des dents au fil d'une l'histoire qui est au diapason de la saison : il est question d'enfants maltraités et abusés, d'une bande de copains de chasse sans scrupules, et d'une vengeance qui, comme le dit le proverbe, est un plat qui se mange froid. D’hypothèses en fausses pistes, Martin et Ziegler mènent l'enquête tandis que la jeune Diane fait ses armes auprès d'un patient redoutable d'intelligence et de manipulation. Un récit parfaitement maîtrisé, un très bon thriller.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

haute montagne / pendaison / vengeance /


Posté le 19/10/2022 à 17:17

2022/80 La colline aux disparus, Tant French / trad. de l'anglais. Calmann Lévy, 03/2022 (noir). 460 p. 22,50 p. *****

Cal Hooper, ancien flic de Chicago, a quitté les Etats-Unis pour s'installer en Irlande, dans un village au sud de Dublin. Il a la ferme intention d'oublier ses soucis et ses cas de conscience en retapant une vieille maison et en faisant connaissance avec ses nouveaux voisins. Mais sa tranquillité est troublée par l'arrivée de Trey, un jeune garçon du village, qui lui demande son aide pour retrouver son frère aîné disparu depuis un moment sans que cela ait suscité l'inquiétude des habitants. Cal se retrouve bien malgré lui plongé dans une enquête qui met à jour des secrets et des mensonges bien cachés sous la façade respectable du joli village...

         C'est un roman qui prend son temps. Celui de Trey tout d'abord, que Cal va apprivoiser en lui faisant restaurer un ancien bureau, jusqu'à ce que le jeune garçon lui demande son aide. Celui de Cal qui s'acclimate progressivement au temps irlandais fort différent de celui de Chicago et aux habitudes de cette campagne irlandaise où tout le monde se connaît, s'apprécie ou se déteste cordialement. Celui d'une enquête qui n'en est pas tout à fait une, car si Cal n'a rien perdu de ses réflexes de policier, il agit ici en tant que simple civil, sans les moyens auxquels il est habitué. Mais il est pugnace, et va révéler une vérité bien triste… En filigrane de ce récit, c'est l'Irlande rurale que peint l'auteur, ses cieux gris où parfois perce la lumière, ses habitants fort en gueule, ses champs de bruyère, ses tourbières, ses moutons et ses lapins… On n'échappe peut-être pas aux clichés, mais ils sont fort joliment racontés, avec une verve réjouissante. On retiendra, entre autres, la scène de beuverie au pub, d'un réalisme saisissant et d'une drôlerie irrésistible. De quoi avoir envie d'aller descendre quelques pintes en bonne compagnie. Slàinte !

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Irlande / disparition / famille / secret /


Posté le 19/10/2022 à 17:12

2022/78 Traverser la nuit, Hervé Le Corre. Rivages, 04/2022 (Noir). 364 p. 9,50 € *****

Après avoir vécu des deuils et des années de dérive, Louise est parvenue à reconstruire sa vie, grâce à la présence réconfortante de son fils Sam. Mais son ancien compagnon la harcèle et finit par l'agresser. Le commandant de police Jourdan, sur les traces d'un tueur responsable de meurtres de femmes à Bordeaux, peine à supporter la misère et les crimes que son métier l'amène à connaître. Dans un Bordeaux crépusculaire et pluvieux, ces deux écorchés vont se rencontrer… Prix Quai du Polar 2022.

       Une ambiance très sombre, qu'il s'agisse du passé et de la vie des deux personnages principaux, ou du lieu. La noirceur du monde se retrouve dans un dénouement d'une tristesse absolue. Noir c'est noir, mais la plume est belle et les personnages traités avec beaucoup de délicatesse.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Bordeaux / désenchantement


Posté le 19/10/2022 à 17:10

2022/69 Méfiez-vous des anges, Olivier Bal. XO, 04/2022. 460 p. 19,90 € ***

         Paul Green, ancien journaliste devenu détective, se consacre à la recherche de personnes disparues. Il est sur les traces de Linda, une jeune femme qui a intégré la très puissante secte La Voie, sur les hauteurs de Los Angeles. Pas d’autre solution pour lui qu’intégrer L’Enceinte, la communauté dirigée par Douglas Fairview, en se faisant passer pour un toxicomane venu chercher la lumière. Pendant ce temps, Sarah Shelley, la jeune flic dotée d’hypermnésie, enquête sur le meurtre d’une jeune femme exsangue et entièrement tailladée. Et si ce meurtre était lié à des pratiques sectaires ?

         Sous le clinquant de la cité des anges se cachent des bas-fonds glauques, qu’il s’agisse des zones de non droit où règnent des bandes et quartels de la drogue, ou des lieux très fermés des sectes qui, rappelons-le, ont une existence parfaitement légale aux Etats-Unis. Olivier Bal nous présente là un bon polar efficace, qui n’évite cependant pas certains poncifs sur les sociétés secrètes ou le miroir aux alouettes d’Hollywood, et les bons sentiments (la rédemption du jeune Rafa).

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / drogue / secte / sang /



Posté le 19/10/2022 à 16:51

2022/54 Le chat du bibliothécaire tome 2 : Inventaire fatal, Miranda James / trad. de l'anglais. J'ai Lu, 11/2021 (Policier). 378 p. 14,90 € ****

Charlie Harris, archiviste à mi-temps et bibliothécaire bénévole, est contacté par un des usagers de la bibliothèque pour un travail particulier. Pas n'importe quel usager et pas n'importe quelle tâche : James Delacorte est l'une des personnalités les plus riches de la ville d'Athena, et demande à Charlie de faire l'inventaire de sa collection de livres rares. Mais à peine Charlie a-t-il commencé que Delcorte est retrouvé mort dans son bureau. Pas de trace d'effraction. Charlie soupçonne un des membres de la famille de la victime, tous plus excentriques les uns que les autres. Comme dans le tome précédent, il va mener une enquête officieuse en parallèle de celle conduite par l'assistante du shérif, accompagné par son fidèle compagnon Diesel. Alors qu'un second meurtre a lieu, la policière le charge de continuer l'inventaire et de jouer aux espions…

On retrouve les éléments qui ont fait la réussite du premier tome : Charlie est toujours aussi bienveillant et malin, et son chat aussi empathique, avec quelques centimètres et trois bons kilos de plus. Mais la vie de l'archiviste se complique avec l'arrivée de son fils, qui vient de démissionner des son cabinet d'avocats. Sa présence donne un peu d'épaisseur à un personnage qui apparaissait un peu lisse. Dans cette intrigue toujours rythmée par des détails du quotidien – qu'on pourra trouver un peu redondants – et par la relation entre Charlie et son main coon, se greffent des personnages secondaires assez réussis, notamment la famille plus que dysfonctionnelle de la victime. De quoi permettre maints soupçons et moult fausses pistes, avant que Charlie et l'adjointe du shérif ne parviennent presque en même temps à identifier le coupable. Un roman à l'ambiance toujours agréablement surannée, aux accents un peu britannique, à lire devant un bon thé chaud avec quelques scones à la crème aigre.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

livre /  bibliothèque / héritage / famille /


Posté le 06/06/2022 à 18:51

2022/53 Le chat du bibliothécaire tome 1 : Succès mortel, Miranda James / trad. de l'anglais. J'ai Lu, 11/2021 (Policier). 318 p. 14,90 € ****

Athena, Mississippi. Charlie Harris, veuf, est archiviste et bibliothécaire, et vit dans la maison de sa tante récemment décédée, en compagnie de son fidèle Diesel, un maine coon de deux ans qui l'accompagne partout, pour le plus grand plaisir des habitants de la ville. Godfrey Priest, ancien camarade de lycée de Charlie et célèbre auteur de polars à succès, est invité pour une séance de dédicace. Charlie n'apprécie guère l'écrivain qui l'a malmené pendant leur scolarité, mais accepte de le recevoir quand ce dernier lui demande son aide dans la révélation qu'il s'apprête à faire : Justin, l'étudiant que loge Charlie est son fils, et il ne sait comment lui annoncer la nouvelle. Mais quelques heures plus tard, Justin appelle Charlie à l'aide : il vient de trouver son père mort dans sa chambre d'hôtel. Le bibliothécaire, soucieux de protéger son locataire, décide de mener une enquête en parallèle de celle conduite par l'assistante du shérif.

Contrairement à ce qu'on aurait pu croire en lisant la quatrième de couverture, l'enquêteur est bien Charlie et non le chat. L'animal est cependant très présent dans l'histoire, emmené partout grâce au harnais dont l'a équipé son maître. Il suscite la sympathie et semble doué d'empathie. Tout autant que Charlie, profondément bienveillant, qui collecte des informations et prend soin de tous. Le récit s'articule autour de la relation entre ces deux-là, et des personnages secondaires assez bien campés. Si le récit souffre de détails inutiles – Charlie se douche, revêt son pyjama, enfile le harnais à Diesel, se régale des dîners concoctés par sa gouvernante -, l'histoire se déroule sans accroches, avec hypothèses et fausses pistes, dans une ambiance qui a quelque chose d'un peu britannique. Un roman comme un plaid bien doux dans lequel on se love quand les soirées se font un peu fraîches.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

bibliothèque / écrivain / jalousie / vengeance /


Posté le 06/06/2022 à 18:49

2022/49 Les samaritains du Bayou, Lisa Sandlin / trad. de l'anglais. Belfond, 09/2021 (Noir). 331 p. 22 € **

Une petite ville texane,1973. Delpha Wade sort de prison après avoir purgé une peine de quatorze ans pour avoir tué l'un des deux hommes qui l'ont violée. Elle trouve un job de secrétaire dans le bureau du détective privé Tom Phelan, qui vient tout juste d'ouvrir son cabinet. Delpha se rend vite indispensable à l'apprenti détective et aide grandement Phelan dans la résolution de ses enquêtes. Le duo fonctionne bien, mais Delpha est toujours hantée par son traumatisme, d'autant que l'un des deux violeurs vit dans les environs...

Double peine pour Delpha qui peine à se faire embaucher. Mais elle est dotée d'une force de caractère peu commune pour retrouver une vie normale, et tant pis si elle doit forcer la main à ses futurs employeurs. Ainsi trouve-elle conjointement un travail de secrétaire de détective le jour, et d'aide-soignante le soir, ainsi qu'un logement. Le personnage de Delpha pourrait être sympathique, mais il lui manque une véritable dimension psychologique qui la rendrait attachante. Elle paraît froide et sans réelle émotion, acceptant sans sourciller de mettre fin à sa liaison avec un jeune homme, à la demande de sa mère. Et comment imaginer qu'elle puisse si facilement entrer dans une relation intime après le traumatisme qu'elle a subi ? De même Tom Phelan semble bien falot et sans réel caractère. Autour de ces deux personnages principaux gravitent de trop nombreux personnages secondaires, qui ajoutent à la confusion d'un récit qui s'éparpille entre les enquêtes du cabinet Phelan et la propre quête de Delpha, qui s'avère finalement assez secondaire. J'ai cherché finalement l'explication du titre mais n'ai trouvé dans ce roman ni samaritain ni réellement de bayou.

Catégorie : Romans noirs

Etats-Unis / prison / enquête / femme /


Posté le 06/06/2022 à 11:43

2022/45 Le cercle des mensonges, Céline Denjean. Marabout, 03/2021 (Black Lab). 467 p. 19,90 € ****

Une femme de ménage assiste au meurtre d'un jeune homme qui n'est autre que le neveu du ministre des finances. Persuadée que les assassins l'ont vue, et sans papiers, elle préfère se cacher plutôt que d'aller voir la police. C'est sa collègue qui est tuée. Le lieutenant de police Urbain Malot, surnommé le Zèbre, enquête sur cette mort. Pendant ce temps, la gendarme Eloïse est chargée d'identifier le meurtrier d'une femme retrouvée dans la forêt de Buzet, près de Toulouse. Ces deux enquêtes vont se rejoindre et révéler l'existence d'un laboratoire clandestin qui utilise des SDF comme cobayes pour des expériences illégales…

Un thriller bien construit, qui évite le piège d'une révélation à la Hercule Poirot et met en lumière l'impuissance des enquêteurs et de la justice quand sont impliquées des personnalités puissantes. Malgré deux enquêtes parallèles – et une troisième, puisqu'Eloïse est en off sur la trace d'une ancienne grande prêtresse - qui ne se lient que tardivement et de nombreux personnages, le lecteur y retrouve facilement ses petits. Quant aux deux protagonistes, malgré un dénouement un peu attendu, ils sont attachants et plutôt bien caractérisés. Un bon moment de lecture.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

complot / politique / cobaye /


Posté le 06/06/2022 à 11:39

2022/42 Les fêlures, Barbara Abel. Plon, 03/2022. 421 p. 20 € ***

Roxane Leprince et Martin Jouanneaux forment un couple fusionnel. Au point de vouloir se suicider ensemble, comme Roméo et Juliette. Mais Roxane se réveille, contrairement à son compagnon. Elle va devoir expliquer ce geste ultime auprès de ses proches et de ceux de Martin, ainsi que devant la police. De victime, elle devient suspecte, d'autant que la mère de Martin est persuadée de sa culpabilité et se sert de son entregent pour hâter la procédure judiciaire. Le récit remonte le temps, à travers les voix de Garance, la sœur aînée de Roxane, d'Odile, la mère de Martin, d'Adrien, son frère… dévoilant progressivement des failles et des fêlures au sein d'un couple que tous pensaient parfait, ainsi que dans leur entourage.

Le monstre n'est pas celui qu'on croit. Voilà le message qui soutend le récit, en filigrane. Ne nous fions pas aux apparences, l'impitoyable Odile n'est pas forcément la créature au sang froid que l'on nous dépeint, Roxane moins angélique que son visage le laissait supposer, et le gentil Martin pas aussi lisse qu'on aurait pu le penser. D'hypothèse en fausses pistes, le récit soulève peu-à-peu les voiles pour atteindre une vérité peu reluisante faite de manipulations, de mensonges, de faux semblants et de vengeance. Un thriller psychologique qui se lit sans effort ni déplaisir, malgré certaines longueurs et un dénouement un peu facile.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

couple / famille / suicide / vengeance / secrets /


Posté le 09/05/2022 à 18:01

2022/22 Le carnaval des ombres, R.J.Ellory / trad. de l'anglais. Sonatine, 06/2021. 605 p. 24 € **

Seneca Falls, Kansas, 1958. Un cirque ambulant vient de planter son chapiteau dans la ville et propose un spectacle où les performances des artistes suscitent chez les habitants un mélange de fascination et de méfiance. Mais la troupe vient à peine de se produire une première fois qu'un corps est découvert sous le carrousel. L'agent spécial Michael Travis est envoyé par la section X du FBI afin d'identifier la victime et de retrouver son meurtrier. Il entreprend d'interroger les membres de la communauté du cirque, dont l'attitude et les propos sont assez dérangeants pour l'enquêteur.

Travis n'a pas eu une vie facile : sa mère, victime de violences conjugales, a fini par tuer son père. Tandis qu'elle était incarcérée en attendant son jugement, Michael a été placé dans un foyer où il a subi un harcèlement particulier, avant d'être pris en charge par une jeune femme. Mais sa mère a été condamnée à mort, puis sa tutrice, avec laquelle il avait noué une relation intime, est décédée d'un cancer. Alors Michael s'est endurci, et a développé une rigueur toute militaire. Méthodique et organisé, il vient d'être promu agent senior quand on l'envoie enquêter dans un milieu qui va peu-à-peu saper toutes ses certitudes. C'est cette lente prise de conscience que raconte cette histoire, bien plus que l'enquête sur la victime, qui n'est – à plusieurs titres – qu'un prétexte au parcours de ce personnage. Autour de lui, une cohorte de personnages inquiétants, un homme doté de 14 doigts, un nain télépathe, un squelette vivant, et un directeur de troupe qui semble trop bien le connaitre. Le paranormal s'oppose au pragmatisme policier, qu'il ébranle lentement mais sûrement, trop lentement sans doute, dans ce roman bien trop long, qui aurait sans doute gagné à être resserré, plus efficace, malgré une atmosphère bien campée et des personnages intéressants. Au final, le FBI tisse sa toile, en lien avec d'obscures forces politiques en guerre contre le communisme, et dans un vaste complot où œuvrent discrètement les francs-maçons. On nous cache tout, on nous dit rien…

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / années 50 / maccarthysme / complot / FBI / cirque / paranormal /


Posté le 07/03/2022 à 17:54

2022/20 L'assassin de la rue Voltaire, Henri Loevenbruck. XO, 10/2021. 461 p. 21,90 €

Troisième tome des aventures de Gabriel Joly. Le jeune journaliste porte encore le deuil de la mort de Lorette, la jeune bibliothécaire du couvent des Cordeliers, dont il était tombé éperdument amoureux. Son meurtrier est introuvable. Gabriel se terre dans l'appartement de la jeune femme, et s'abrutit à l'opium, au grand dam de ses amis qui ne parviennent pas à l'en sortir. Mais le meurtre d'un spectateur de la Comédie française, puis de comédiens et du régisseur poussent le commissaire Guyot à faire appel à sa sagacité. Le jeune homme accepte de l'aider dans son enquête au sein de la prestigieuse institution…

Changement de décor pour ces nouvelles aventures de "la Plume", comme le surnomme son ami pirate. Tout se passe dans le dédale du plus célèbre théâtre français, truffé de coursives et d'escaliers. Dans ce microcosme qui réunit 140 personnes, des simples techniciens au doyen des sociétaires, Gabriel et le commissaire vont devoir identifier le coupable, alors même que les suspects sont réunis sous bonne garde et que le meurtrier continue ses méfaits. Y aurait-il un fantôme dans ces lieux, capable de se volatiliser d'une loge gardée par un policier ? Cette fois, il n'est plus question de se défendre à coups de fleuret ou d'escalader des parois avec une simple corde, c'est plutôt le verbe qu'on manie. Tandis qu'au dehors, on débat sur les articles de la future déclaration des droits de l'homme et du citoyen, Gabriel mène son enquête dans un huis clos qui n'est pas sans rappeler l'ambiance des Dix petits nègres et, comme Hercule Poirot, accumule les indices pour, enfin, démasquer le meurtrier avec une facilité qui peut laisser un peu pantois. Mais le travail de documentation est toujours aussi solide, les personnages haut en couleurs, et la lecture fort plaisante.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

18ème siècle / théâtre / comédiens / jalousie / vengeance /


Posté le 07/03/2022 à 17:51

2022/15 1991, Franck Thilliez. Fleuve noir, 05/2021. 498 p. 22,90 € *****

Décembre 1991. Le jeune inspecteur Franck Sharko prend ses fonctions au 36 quai des Orfèvres. Il est chargé d'une enquête sur un "cold case", les Disparues du Sud parisien. Trois femmes retrouvées violées et assassinées à coups de couteau entre 1986 et 1989, sans qu'on n'ait jamais retrouvé leur meurtrier. Armé de son calepin et du Minitel, Sharko se plonge dans le dossier, jusqu'à ce qu'un soir un homme paniqué arrive au commissariat, en possession de la photo d'une femme menottée sur un lit, la tête couverte d'une cagoule. Au verso figure une adresse. Sharko lâche son dossier et fonce, quitte à griller la politesse à l'équipe d'astreinte ce soir-là...

Bienvenue dans un monde où les portables n'existaient pas, où les fichiers ADN n'en étaient qu'à leurs balbutiements, où l'on cherche son chemin avec une carte routière, où l'on envoie des fax à son amoureuse ! L'enquête se passe à l'ancienne, mais le travail, au fond reste le même : des heures supp à ne plus les compter, des sandwichs avalés à la hâte, des scènes de crime à la limite de l'insoutenable, un meurtrier d'une intelligence machiavélique… Sur fond de vaudou, de prestidigitation et de déviance psychologique et sexuelle, c'est la première enquête de Sharko, qui par sa pugnacité et son sens du devoir se fait vite une place au sein de l'équipe, quitte à mettre sa propre vie en danger, ainsi que sa relation avec Suzanne, laquelle ignore encore qu'elle va partager sa vie avec un fantôme tout dévoué à ses enquêtes. Un thriller semé d'indices savamment dosé, dans l'ambiance des années 90.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

magie / vaudou / schizophrénie /


Posté le 10/02/2022 à 11:48

2022/14 Le sang des Belasko, Chrystel Duchamp. L'Archipel, 01/2021 (Suspense). 237 p. 18 € ***

Le patriarche de la famille Belasko, un vigneron taciturne, vient de mourir. Ses cinq enfants se réunissent dans la maison familiale pour prendre connaissance du testament. Le défunt a laissé une lettre, dans laquelle il révèle à ses enfants que leur mère n'est pas morte suicidée mais assassinée. Cette révélation délie les langues : au cours d'une longue nuit, enfermés dans une maison cadenassée dont personne ne peut s'échapper avant l'ouverture des portes et fenêtres le lendemain, chacun des frères et sœurs fait tomber les masques et révèle ses rancœurs et ses jalousies.

Chrystel Dychamp revisite la thématique du huis clos avec la réunion de cette fratrie qui règle ses comptes, enfermée dans une véritable forteresse. A la jalousie succèdent les révélations, les injustices, les frustrations, puis la violence qu'on était parvenu tant bien que mal à contrôler jusqu'à présent et, pour certains, des bouffées délirantes. La "Casa" n'y est pas étrangère, capable de sentiments tels qu'elle les raconte dans la prologue, et qui enferme les membres de cette famille dans ses murs qui cachent bien des secrets. Famille je vous hais, les rivalités sont alors poussées à leur paroxysme, sur un fond de malédiction familiale, quitte à ce que le trait paraisse un peu forcé et peu réaliste. Mais ne boudons pas notre plaisir, si chacun des frères et sœurs finit par aller vite en besogne, la tension est habilement alimentée, jusqu'à un épilogue parfaitement logique et effrayant.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

famille / vengeance / jalousie / folie / malédiction /


Posté le 10/02/2022 à 11:46

2022/12 Emersion, Michal Fenris. Les nouveaux Auteurs, 10/2021. 371 p. 18,95 € **

La ville natale de Jedediah a été détruite par une tempête de feuilles, envoyée par les esprits de la nature pour punir ceux qui ne respectent pas l'environnement. Deux ans plus tard, il est victime d'un accident de voiture qui coûte la vie à sa femme enceinte. Il est persuadé que la Nature s'est une fois de plus vengée. Evidemment, personne ne croit à son histoire, et on l'interne, à la demande de son beau-père, dans un hôpital psychiatrique contre sa volonté. Gavé de médicaments, il a perdu la mémoire et jusqu'à son identité. Mais voilà qu'il est contacté par un mystérieux groupe écologiste militant qui prétend qu'il est le seul à pouvoir enrayer la catastrophe qui menace. Il décide alors de ne plus prendre de traitements et parvient à s'enfuir de l'hôpital…

L'esprit de la nature veut se venger de la destruction orchestrée par l'homme sur les espaces naturels. Il déploie des milliards de feuilles pour menacer, voire détruire son prédateur. Jedediah est l'oshkaabewi, le messager, le seul capable d'arrêter le processus, malgré sa dendrophobie (peur des arbres) consécutive à son accident. Notre héros va donc passer plus de 200 pages à tenter de contenir l'invasion végétale, avec quelques alliés providentiels. Les obstacles ne cessent de se dresser contre lui; soit humains en la personne de son beau-père, sénateur malhonnête qui lui voie une haine féroce, soit végétaux. La nature érige des murs infranchissables, fait souffler des tempêtes d'une violence inouïe, les feuilles s'auto reproduisent et forment une véritable entité monstrueuse aux excroissances mortelles, n'en jetez plus, l'humanité va payer cher les dommages infligés à la planète. En vertu de son rôle de messager et, ainsi le découvrira-t-on plus tard dans le récit, d'ascendance indienne, Jedediah est le seul à pouvoir franchir les murs de feuilles sans être déchiqueté ou écrasé. Ce qui n'empêche nullement les feuilles de l'attaquer ni de tout mettre en œuvre pour l'arrêter dans sa mission. Une mission que le principal intéressé semble ignorer, avançant à l'aveuglette sans savoir ce qu'il doit faire si ce n'est qu'il doit faire quelque chose.

Un récit incohérent à l'intrigue sans réelle construction dramatique, des maladresses de style, des passages inutilement explicatifs, des personnages sans profondeur (la jeune indienne June au caractère bien trempé se retrouve ensuite cantonnée à un rôle de faire-valoir, le méchant sénateur disparaît de l'histoire, et que dire de la demi-sœur miraculeusement rencontrée ?), qui s'achève de façon abrupte et sans aucune logique. La bonne idée de départ aboutit à un résultat brouillon et peu convaincant.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

forêt / nature / environnement / vengeance /


Posté le 10/02/2022 à 11:43

2022/7 Le serpent majuscule, Pierre Lemaître. Albin Michel, 05/2021. 331 p. 20,90 € *****

         Mathilde Perrin est une tueuse. A la voir, on ne dirait pas : à 63 ans, un embonpoint pris avec le temps, un visage très maquillé dont on devine qu'il a été jadis joli, elle n'a pas vraiment la tête de l'emploi. Et pourtant elle assassine ses cibles sur commande de deux balles bien senties, sans aucun état d'âme, avant d'aller jeter son arme depuis un pont de la Seine – du moins le croit-elle car elle semble tout doucement perdre un peu la boule. Elle reçoit ses ordres du commandant, un certain Henri avec lequel elle a œuvré en tant que résistante. C'est la guerre qu'elle a fait ses armes et qu'elle s'est révélé la plus coriace, la plus impitoyable sous son joli minois. Bien formée, elle passe parfaitement inaperçue, et aucun flic ne parvient à l'identifier, y compris lorsqu'elle abat froidement le jeune lieutenant de police chargé de l'enquête des multiples meurtres.

         Elle accumule les bourdes, pourtant. Au point que ses commanditaires décident de se débarrasser d'elle. Mais elle est trop expérimentée pour ne pas s'en douter, et pour ne pas déjouer les pièges qu'on lui tend. Entre pertes de mémoire, confusion, attirance trouble pour Henri, et sursauts de lucidité, Mathilde prépare son départ au soleil. Mais suivant la loi éternelle selon laquelle on ne voit pas ce qui est sous nos yeux, elle finira par se faire avoir à son tour. Dans ce récit aux personnages bien caractérisés – le lieutenant long comme un jour sans pain René Vassiliev, le commissaire mangeur d'oléagineux, l'ancien préfet atteint de démence sénile – Pierre Lemaitre semble visiblement s'amuser, quitte à forcer un peu le trait et à dégommer tous ceux qui oseraient se mettre en travers de la route de la tueuse à gages. Comme dans Robe de marié ou dans Cadres noirs, l'auteur manie avec brio humour noir et scénario implacable.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

exécution / contrat / vieillesse /


Posté le 10/02/2022 à 11:37

Les promises, Jean-Christophe Grangé. Albin Michel, 09/2021. 653 p. 23,90 € *****

Berlin, 1939. Un mystérieux tueur s'en prend aux belles oisives du Reich, qui à l'aube de la seconde guerre mondiale boivent du champagne dans les salons luxueux de l'hôtel Adlon. Il les égorge et les éventre avant de les déposer sur les rives de la Spree. Les trois victimes avaient un autre point commun : elles consultaient le Dr Simon Kraus, psychiatre adepte de Freud qui profitait de leurs largesses. L'enquête est confiée au brutal Franz Beewen de la Gestapo, qui fait ensuite appel à Mina Von Hassel, ancienne condisciple de Kraus, et directrice alcoolique d'un institut psychiatrique vétuste où vit la mère de Beewen...

Ces trois-là n'ont rien pour s'entendre : Kraus et Von Hassel n'ont aucune sympathie pour la Gestapo et les nazis ; Kraus qui compense sa petite taille par des costumes hors de prix et une intelligence exceptionnelle essuie le mépris de Beewen, lequel est à son tour méprisé par l'aristocrate Van Hassel dont la richesse familiale la fait passer pour privilégiée aux yeux de l'Hauptsturmführer SS. Les trois héros que tout oppose vont révéler leurs failles et petit-à-petit s’affranchir de leurs préjugés. C'est dans ce trio improbable que réside une grande part de l'intérêt d'un récit bien construit, émaillé de nombreuses fausses pistes où s'enfoncent les trois enquêteurs qui doivent également composer avec la Gestapo qui, et c'est peu dire, s'ingénie à leur mettre des bâtons dans les roues. Si Grangé ne renonce pas au gore de certaines scènes, il s'est visiblement fort bien documenté sur cette période des prémisses de la seconde guerre mondiale et reconstitue parfaitement l'ambiance de l'époque, la peur des dénonciations et la mise en place de la dictature nazie.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Allemagne / nazisme / amitié /


Posté le 13/01/2022 à 15:24

La fosse aux âmes, Christophe Molmy. La Martinière, 08/2021. 299 p. 20 € ****

Fabrice n'aime plus Juliette. Il attend la fin de la projection du film qu'ils sont en train de voir pour lui dire qu'il la quitte. Mais des terroristes surgissent et tirent sur les spectateurs. Juliette meurt, criblée de balles, et Fabrice est un des rares survivants de l'attentat. En proie à la culpabilité du survivant, il traverse l'existence tel un fantôme, jusqu'à sa rencontre avec Clarisse, commissaire, en charge de l'enquête. Ils se revoient et vivent une relation clandestine puisque Clarisse est mariée. Mais voilà que la jeune femme disparait et que Fabrice est accusé...

Fabrice n'a pas survécu à l'attentat sans séquelles. Souffrant de stress post traumatique, il parvient à se reconstruire grâce à Clarisse. Cette première partie, dans laquelle l'auteur a probablement puisé dans ses connaissances et son expérience personnelle de policier, est parfaitement réussie ; elle renvoie inévitablement le lecteur aux horreurs de l'attentat du Bataclan et à la violence avec laquelle les rescapés doivent composer pour survivre. La suite paraît moins crédible, le récit comporte quelques invraisemblances assez surprenantes. Malgré tout, la quête désespérée de Fabrice, désormais en cavale, nous touche en ce qu'elle questionne sur notre humanité, sur le côté obscur que nous portons : il n'a plus rien à perdre, il est prêt à tout pour connaître la vérité, jusqu'à devenir aussi cruel que les terroristes. C'est cette interrogation-là, au-delà des thématiques de la culpabilité et de la résilience, qui donne toute sa force au récit. 

 

Catégorie : Romans noirs

attentat / deuil / trauma / résilience /


Posté le 13/01/2022 à 15:21

De cendres et de larmes, Sophie Loubière. Fleuve Noir, 06/2021. 345 p. 19,90 € ****

Madeline est sapeur-pompier, Christian agent d'entretien des parcs de la ville. Ils vivent avec leurs trois enfants à l'étroit dans un petit appartement parisien, et rêvent d'un espace qui n'est pas à la portée de leur bourse. Mais voilà que Christian se voit proposer un poste de gardien conservateur du cimetière de Charenton, dans le 12ème arrondissement parisien, et de loger gratuitement dans un pavillon de 180 m². Une occasion à ne pas manquer ! Mais tandis que Madeline s'occupe des vivants et que Christian veille sur les morts, la famille se retrouve plongée dans une ambiance délétère...

Une maison vétuste et humide, au chauffage défaillant, construite en plein milieu d'un cimetière… On pourrait craindre le pire, des phénomènes paranormaux, des fantômes et autres joyeux spectres convoqués pour Halloween. Non. C'est bien la maison qui pose problème, et tout le talent de conteuse de Sophie Loubière pour faire basculer tout doucement, mais inexorablement, une famille aimante dans un malaise contagieux dont le père est la première victime. Madeline, qui doit jongler avec un travail très prenant et des contraintes familiales accrues, assiste au lent délitement de l'homme qu'elle aime ; les enfants endurent les contraintes paternelles avec résignation, jusqu'au point de rupture. Sophie Loubière, qui a manifestement accompli un solide travail de documentation, maîtrise parfaitement le rythme de son récit tout en jouant avec les codes du roman fantastique et du thriller psychologique.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

mort /  maison / famille /


Posté le 17/12/2021 à 09:52

Les sœurs de Montmorts, Jérôme Loubry. Calmann-Lévy, 08/2021 (Noir). 425 p. 20,50 € ***

Camille, une jeune journaliste est contactée par une femme mystérieuse qui lui offre un scoop. Elle l'emmène dans un village et lui fait lire, au cours du trajet, l'histoire de Julien Perrault. Ce policier prend ses nouvelles fonctions comme chef de la police de Montmorts. Une ville sans histoire, équipée de caméras de surveillance dernier cri, et qui appartient entièrement au maire, Monsieur de Thionville, un richissime homme d'affaires dont la fille âgée de 12 ans a été jetée du haut du pic dix ans plus tôt. Comme les femmes accusées de sorcellerie au cours des siècles précédents. De Thionville demande à Julien de faire la lumière sur ce drame, comme il en avait chargé son prédécesseur, qui est décédé dans un accident de voiture. Julien s'installe dans la maison de l'ancien policier, et sympathise avec son équipe qui a fort à faire quand des habitants se mettent à entendre des voix et se suicident…

         Comme Camille, le lecteur se laisse embarquer dans une histoire bien menée où le fantastique le dispute au policier. L'enchâssement de récit est somme toute assez classique, jusqu'à un premier dénouement guère surprenant, tant les indices semés en tête de certains chapitres l'annonçaient. Mais voilà qu'un dernier coup de théâtre vient renverser la situation, un effet de surprise qui tombe à plat car parfaitement artificiel et facile. Bien évidemment, il ne s'agit pas envie de déflorer le récit et de couper tout plaisir au lecteur, mais ce nouvel opus est une grosse déception Je n'ai pas retrouvé dans ce roman l'intelligence à l'œuvre dans Les Refuges. Et je suis un peu  hermétique aux injonctions : l'auteur propose une playlist à écouter – "cette "expérience" pourrait se révéler utile dans votre lecture" écrit-il en préambule. Tant mieux si un univers musical peut inspirer son auteur, mais pour ma part, je pense qu'un livre se suffit à lui-même. La manipulation du lecteur a ses limites.

 

Catégorie : Roman policier / Thriller

famille / folie / suicide / harcèlement / thérapie / manipulation /


Posté le 04/10/2021 à 18:17

Code 93, Olivier Norek. Pocket, 11/2014. 341 p. 7,60 € *****

         Dans un entrepôt désaffecté du canal de l'Ourq, un homme est retrouvé abattu de trois balles dans la poitrine, et émasculé. Mais le cadavre ressuscite sur la table d'autopsie. Ce n'est pas un ange, si on en croit la visite de sa cave dans une des cités du 93. L'équipe de Victor Coste, se voit bientôt chargée d'enquêter sur un deuxième meurtre, un homme entièrement brûlé, victime à première vue d'une combustion spontanée. Coste doit mener les recherches alors que son bras droit s'apprête à quitter Paris, remplacé par une jeune femme tout juste sortie de l'école de police. Dans le même temps, il reçoit des lettres anonymes l'encourageant à revoir les rapports d'enquête concernant les morts de jeunes toxicomanes…

         Premier opus du capitaine de police, ce roman sent le vécu à plein nez. Descriptions sans concession de scènes de crime ou d'autopsie, galerie de portrait des enquêteurs, quartiers laissés pour compte par les élus où règnent trafics de drogue et organisation de viols en collectivité, bienvenue en Seine-Saint-Denis ! Olivier Coste mène son intrigue avec brio, mêle caïds des quartiers et grande bourgeoisie malsaine, vengeance et disparitions non élucidées. Avec la naissance du capitaine Coste, qui a le 93 dans la peau.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

banlieue / trafic / disparition / famille / vengeance /


Posté le 03/08/2021 à 18:28

La forêt des disparus, Olivier Bal. XO, 04/2021. 437 p. 19,90 € ****

         La forêt de Redwoods, dans l'Oregon, peuplée de séquoias millénaires, est très appréciée des randonneurs. Mais certains d'entre eux disparaissent sans laisser de traces. Lauren, adjointe du shérif, passe la majeure partie de son temps dans les bois pour tenter de les retrouver. En vain, mais elle refuse de baisser les bras, malgré la désapprobation de son mari. Dans la forêt vit Paul Green, un homme solitaire que les habitants ont surnommé l'Etranger. Ancien journaliste, il s'est mis à l'écart de la société suite à une affaire criminelle. Voilà qu'un soir, une adolescente paniquée frappe à sa porte et lui réclame de l'aide...

         L'arrivée de Charlie, la jeune fille terrorisée, va amener l'ermite et la policière à travailler de conserve sur des disparitions qui semblent ne préoccuper qu'eux. Jusqu'à ce que les disparitions ne concernent plus seulement des touristes, mais des jeunes gens de la ville. Au-delà de l'enquête policière, c'est le portrait terrifiant d'une petite ville qui se dessine, où tout le monde se connaît, où on est allé à l'école ensemble, où des liens d'amitié faussent les jugements ; une petite ville où les préjugés ont la vie dure, ainsi que certaines traditions héritées de ses fondateurs. La méfiance et l'entre soi vont ainsi permettre de désigner, en la personne de Paul, un coupable tout tracé. La forêt, sombre, broussailleuse, pleine de combes où la lumière n'entre pas, concourt largement à l'atmosphère crépusculaire, ainsi que les ruines de l'ancien village effondré sur les tunnels creusés sur le site d'exploitation minier. Olivier Bal a su tirer parti du thème rebattu de la disparition, et nous propose un roman choral bien construit et diablement efficace.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

forêt / confrérie / intolérance / chasse /


Posté le 03/08/2021 à 18:22

Le Mystère de la Main rouge, Henri Loevenbruck. XO, 10/2020. 460 p. 21,90 € ****

La suite du Loup des Cordeliers. Nous sommes en juillet 1789, juste après la chute de la Bastille. Gabriel Joly a découvert le visage de celui qu'on avait surnommé le Loup des Cordeliers. Mais ce mystérieux assassin disparait. Gabriel part à sa poursuite jusque dans les maquis de la Corse, sur les traces d'une société secrète appelée la Main rouge, qui tente d'influer sur la Révolution en cours...

Comme dans l'opus précédent, on a affaire à un roman de cape et d'épée, où les héros sortent toujours de situations les plus périlleuses. Et ça ne rigole pas : on manie l'épée, on fente, feinte, recule, avance ; on touche, blesse, tranche. Même les femmes sont des as de la lame, et ne craignent pas d'affronter plusieurs adversaires à la fois. Les péripéties s'enchaînent, et tant pis si certains détails pratiques sont peu plausibles comme escalader la muraille d'une forteresse à la corde quand on est une femme du 18ème siècle, entrecoupées par un contexte historique toujours fort documenté sur la mise en place de la République et les rivalités entre ses partisans. L'auteur a su tremper sa plume à l'encrier d'une langue soutenue, imagée, délicieusement argotique parfois, dans un travail qui fait penser à celui de Jean-François Parot dans les aventures de Nicolas Le Floch. Ne boudons pas notre plaisir.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

18ème siècle / Révolution / secte / Paris / Corse /


Posté le 16/07/2021 à 18:15

Barré, François Claveau. Moissons noires, 07/2018. 240 p. 18 € ****

Lors d'une planque avec sa collègue Aurélie Laurencin, le lieutenant Donat Vigier se retrouve complètement paralysé, faisant échouer l'arrestation du braqueur. Le voilà cloué sur un lit d’hôpital en réanimation, victime du syndrome de Guillain-Barré. Passablement assommé par les médicaments, branché sur respirateur, il retrouve quelques moments de conscience pour continuer à pister le criminel. Mais il se sent menacé : quelqu'un rôde dans sa chambre la nuit. Est-il victime d'hallucinations dues aux multiples traitements ? Ses doutes s'envolent quand on retrouve à proximité de l'hôpital une des infirmières du service…

Heureusement pour lui, le lieutenant parvient à bouger quelques doigts de sa main droite et à griffonner sur une ardoise. C'est ainsi que, de façon très concise, il peut donner quelques pistes à ses collègues qui grâce à lui vont résoudre les deux enquêtes. Si le contexte hospitalier et les symptômes de la maladie sont fort bien décrits, on est tout de même pris de quelques doutes quant à l'agilité d'esprit du policier gavé de benzodiazépines et autres molécules du même acabit. Donat ne voit-il pas des korrigans dans sa chambre ? A part ce détail, l'histoire est crédible, servie par une galerie de personnages dont certains sont dans doute un peu caricaturaux – son collègue Renaudie aux cheveux gras comme des frites, amoureux de la belle Aurélie qui n'a d'yeux que pour Donat ; le cortège des médecins inquiétants, des aides-soignants balèzes et des accortes infirmières -, et par des passages in situ sur les diverses sensations qu'on peut avoir quand on est paralysé dans un lit d'hôpital à la merci du moindre visiteur. Un polar efficace qui se lit avec plaisir.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

hôpital / maladie /


Posté le 19/05/2021 à 16:48

Alabama 1963, Ludovic Manchette / Christian Niemiec. Le Cherche-Midi, 08/2020. 374 p. 18 € ****

         Dans cet état du Sud, la ségrégation bat son plein. La découverte du cadavre d'une petite fille noire ébranle la communauté de Birmingham, mais la police semble peu se mobiliser pour retrouver le meurtrier. Adela Cobb, jeune veuve mère de famille, est femme de ménage chez des Blanches. Congédiée par l'une d'elles, elle va travailler chez Bud Larkin, ancien flic et alcoolique notoire, à qui les parents de la petite victime ont confié l'enquête. Mal accueilli par les Noirs, Bud sollicite l'aide d'Adela. Petit-à-petit, alors que d'autres petites filles sont trouvées mortes, il commence à se débarrasser de ses préjugés. Adela fait preuve d'un sens pratique étonnant et se révèle une précieuse alliée.

A l'instar de Bud, d'autres Blancs commencent à ouvrir les yeux, même si les Noirs continuent à monter à l'arrière du bus, à utiliser les lieux dûment étiquetés "Colored" et éviter les zones des parcs mentionnés pour "White only" ; le Klu-Lkux-Klan a encore quelques belles heures devant lui, mais le changement est en route. La toile de fond de l'Amérique raciste est vivante et bien restituée – on croise même à la laverie où officient Adela et ses consœurs une parente de Rosa Luxembourg –, l'histoire coule d'une traite grâce au duo de personnages, bien que Bud n'échappe pas aux clichés du genre. Malgré le plaisir de la lecture, on pourra regretter que les auteurs aient cédé à quelques facilités : les Blancs les moins racistes sont une vieille dame excentrique ou une jeune Canadienne fraîchement débarquée, parfaitement imperméable aux préjugés, et accessoirement homosexuelle ; l'identité du meurtrier nous est révélée par la magie d'un narrateur omniscient et un rebondissement peu crédible.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / années 60 / ségrégation / meurtre /


Posté le 10/05/2021 à 15:57

Impact, Olivier Norek. Michel Lafon, 11/2020. 343 p. 19,95 € ***

Virgil Solal et sa femme Laura ont perdu leur petite fille dès sa naissance en raison, semble-t-il, d'une maladie des poumons due à la pollution. Désespéré et déterminé à venger la mort de sa fille, Solal va se lancer dans le militantisme écologique et obliger les pollueurs à adopter la transition écologique, même s'il faut pour cela en passer par la violence et une hyper médiatisation. Ainsi enlève-t-il le PDG de Total pour exiger de l'entreprise qu'elle cesse ses activités polluantes. Un flic de la PJ est chargé de l'enquête, secondé par une psychologue chargée de déterminer le profil de Solal.

L'écologie a le vent en poupe. Il faut dire qu'il y a de quoi : marées noires dans le delta du Niger, tempêtes de grêle en France, incendies en Australie, disparition progressive des ressources fossiles, réchauffement climatique, glyphosate, lobbies bancaires, impuissance gouvernementale, pollution de l'air et des rivières en Inde, crise de l'eau, dégradation des écosystèmes… Olivier Norek recense les de son domaine habituel. Certes, il y a bien une enquête, et on assiste au travail de la police. Mais l'intrigue policière est au service d'un discours écologique militant basé sur des faits ; discours repris par la plaidoirie de l'avocat de Solal, qui fait pour le défendre le procès de l'Etat non seulement coupable de négligence, mais aussi de crime contre l'humanité. La cause est juste, les arguments sans faille. Cependant, demeure la question du meurtre : a-t-on le droit de tuer pour défendre l'écologie et développer les consciences ? L'auteur laisse volontairement la question sans réponse, comme une interpellation : jusqu'où faudra-t-il aller pour qu'enfin on prenne toute la mesure de la catastrophe à l'œuvre, que nos dirigeants légifèrent contre l'exploitation démesurée et que nous tous citoyens modifiions en profondeur leur mode de vie ? Libre à chacun d'apprécier le virage écologiste pris par l'auteur et le ton militant de son nouvel opus.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

écologie / climat / responsabilité / militantisme /


Posté le 10/04/2021 à 19:27

Nos derniers festins, Chantal Pelletier. Gallimard, 05/2019 (Série noire). 196 p. 18,50 € ***

Juin 2044. Au nom de l'économie et de la prévention, on pénalise tout consommateur de gras ou de sucré, qui se voit pénalisé par le retrait de points sur son permis de table. A cause de la prohibition, camembert et foie gras se vendent au marché noir, et les restaurants clandestins sont légion. Anna Janvier et Ferdinand Pierraud, contrôleurs alimentaires, découvrent, au cours d'une mission dans une Provence caniculaire, le cadavre d'un jeune cuisinier employé en extra dans un restaurant clandestin. Ils doivent laisser l'enquête à la police et vont ensuite s'intéresser de près au restaurant gastronomique de Lou où travaillait la victime, et dont la patronne ne prête guère attention aux points restants sur le permis de table de ses clients…

Pure science-fiction ? Le futur imaginé par Chantal Pelletier pourrait tout à fait être probable : des mafias font commerce de denrées prohibées comme on le faisait de l'alcool dans les années 20 aux Etats-Unis, tout amateur de bonne chère se voit puni à moins qu'il n'ait dépassé les 80 ans, âge à partir duquel toutes les gourmandises lui sont permises, et végans, locavores, anti gluten et autres partisans de régimes alimentaires s'affrontent dans de sanglantes manifestations. Le tandem formé par les deux contrôleurs est parfaitement improbable et assez drôle : la truculente Janvier au verbe haut, gourmande et pas toujours très raffinée, qui s'amuse à tyranniser le petit nouveau qui, comble de malchance, souffre de multiples allergies alimentaires et ne supporte pas le soleil.  Mais le récit, bien que publié dans la collection Série noire, n'est pas vraiment un roman policier : si Ferdinand s'obstine à traquer le criminel, c'est en douce quand la Janvier ne l'a pas chargé d'une autre activité ; par ailleurs l'histoire personnelle de Lou prend une dimension grandissante au fil du récit. Finalement, pas de réel coup de théâtre ou de surprise, les raisons pour lesquelles le malheureux cuisinier a fini sa carrière noyé dans sa blanquette sont assez secondaires ; ce qui compte, c'est la gourmandise, le plaisir du boire et du manger, sans culpabilité ni régime.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

gastronomie / anticipation / régime alimentaire / prohibition /


Posté le 01/02/2021 à 17:52

Le loup des Cordeliers, Henri Loevenbruck. Pocket, 10/2020. 621 p. 8,70 € ****

         Mai 1789. Alors que la révolte gronde à Paris, un mystérieux justicier masqué hante les rues, armé d'un sabre et accompagné d'un loup, pour traquer les agresseurs de femmes. Ses victimes portent toutes au front sa marque : un triangle inversé. Mais qui se cache derrière le masque du "Loup des Cordeliers" ? Gabriel Joly, tout jeune homme embauché comme journaliste pour tenir la rubrique des spectacles, est davantage intéressé par le journalisme d'investigation et mène l'enquête, convaincu de tenir là une histoire passionnante.

         Au-delà de l'enquête policière menée par un jeune homme ambitieux, fin observateur au point de fasciner un commissaire de police, c'est le Paris révolutionnaire que restitue en détail Henri Loevenbruck. Non content de s'être amplement documenté, il dresse également une série de portraits, s'attachant moins aux grandes figures historiques qu'à des personnages fictifs hauts en couleurs et, s'il force parfois un peu les traits, c'est pour mieux donner corps à une histoire trépidante qui fait la part belle aux intrigues fictives – le mystérieux vengeur masqué ou les aventures de Gabriel – ou réelles – les origines de la Révolution, la création de l'Assemblée nationale ou la tenue des Etats généraux, la censure de la presse, et le rôle joué par les femmes, incarné en l'occurrence par la belle Liégeoise Anne-Josèphe de Terwagne qui manie l'épée avec une aisance d'aventurière. Le récit a des airs de roman picaresque ou de chevalerie, avec son découpage en livres et ses péripéties multiples ; on pense aussi à Gargantua ou à Candide auquel Gabriel emprunte quelques-uns de ses traits, son idéalisme et sa grande probité, la candeur en moins.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Paris / révolution / 18ème siècle / femme / vengeance /

Posté le 04/01/2021 à 17:17

Le dernier message, Nicolas Beuglet. XO, 09/2020. 395 p. 19,90 € ****

Sur l'île d'Ilona, à l'ouest de l'Ecosse, un homme est retrouvé assassiné dans un monastère. Aucune porte n'a été forcée, le coupable doit figurer parmi les cinq moines. L'inspectrice Grace Campbell est chargée de l'enquête, après avoir été mise à l'écart pendant un an. Elle découvre que la victime a été excérébrée, et que l'homme possédait un cabinet au sein même du monastère, dans lequel il faisait des recherches scientifiques très poussées depuis plusieurs années. Très vite, Grace apprend que l'identité de l'homme est fausse. De qui se cachait-il ? Pourquoi a-t-il été assassiné de façon si cruelle ? L'enquête est ardue et Grace va devoir faire appel à toutes ses ressources pour se montrer à la hauteur et retrouver la confiance de ses supérieurs…

Un thriller passionnant, mené tambour battant. Pas de temps mort pour Grace qui doit à la fois résoudre une énigme qui touche à des théories scientifiques inaccessibles au commun des mortels, affronter la puissance d'entreprises malveillantes et composer avec ses propres failles. Au-delà du plaisir évident à se laisser prendre au rythme endiablé du récit, on découvre quelques thématiques scientifiques solidement argumentées, notamment celle de l'appauvrissement du QI dans le monde occidental et la problématique de la création de l'univers, qui enrichissent ce thriller rondement mené de réflexions que le lecteur est invité, en fin d'ouvrage, à prolonger.  

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Ecosse / intelligence / génie / univers / théorie /


Posté le 27/12/2020 à 18:41

Donato Carrisi, La maison des voix / trad. de l'italien. Calmann-Lévy, 10/2020 (Noir). 299 p. 21,50 € ****

A Florence, Pietro Gerber est un pédopsychiatre spécialisé en hypnose. Il est contacté par une consœur australienne afin de suivre une de ses patientes qui vient d'arriver en Italie et souffre de graves troubles mentaux, persuadée d'avoir tué son frère. Bien qu'elle soit adulte, Gerber accepte de la prendre en charge. Au fil des séances, la jeune femme dévoile un passé terrible, mais elle livre aussi quelques détails qui intriguent et inquiètent le thérapeute, qui le concernent personnellement.

Ce roman réunit tous les ingrédients du thriller psychologique, avec une tension grandissante, un suspense entretenu tout du long et une fin agréablement surprenante. Si j'ai été peu impressionnée par la facture assez classique de ce roman et sceptique à voir avec quelle facilité Hanna se laisse hypnotiser, je lui ai trouvé une certaine originalité dans la thématique de la relation patient-thérapeute et dans celle de la mémoire, qui occulte certains faits pour éviter la souffrance, notamment chez les enfants.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Italie / psychologie / hypnose / trauma / mémoire / refoulement /


Posté le 27/12/2020 à 18:38

The Cry, Helen Fitzgerald / trad. de l'anglais. Equinox / Les Arènes, 06/2020. 389 p. 18 € ***

Joanna et Alistair prennent un avion pour l'Australie avec Noah, leur bébé âgé de 9 semaines. Le bébé ne cesse de pleurer pendant tout le vol, au grand dam de sa mère épuisée et impuissante. Mais à l'arrivée, les parents découvrent que leur enfant a perdu la vie. Ils prennent alors une folle décision...

Un bébé impossible à calmer, c'est le cauchemar assuré pour ses parents et pour les passagers. Seule Joanna en est gênée, tandis qu'Alistair ne fait pas grand-chose pour l'aider. Lorsqu'ils s'aperçoivent de la mort de Noah, il fait montre de la même froideur. Alistair est-il un pervers narcissique, davantage préoccupé par sa carrière politique que par le sort de son enfant et l'état de sa compagne ? C'est en tout cas ce que le récit tend à faire croire, puisqu'il est raconté du point de vue de Joanna et d'Alexandra, l'ex femme d'Alistair dont elle a eu une fille que son ancien mari compte bien récupérer en arguant du fait qu'elle est alcoolique. Les deux femmes que tout oppose – Joanna a "volé" son mari à Alexandra – se trouvent donc un but commun : dénoncer la malfaisance et le machiavélisme d'Alistair. C'est là l'enjeu du roman, bien plus que le sort du bébé somme toute réglé assez vite. J'émets donc un avis très réservé sur ce roman, d'autant plus que la décision des parents de cacher la mort de leur enfant en prétendant à un enlèvement, et le battage médiatique qui suit m'ont paru très peu crédibles.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Australie / couple / mort / responsabilité / mensonge /


Posté le 27/12/2020 à 18:36

Contagion, Lawrence Wright / trad. de l'anglais. Le Cherche Midi, 10/2020. 467 p. 22 € ***

Un virus inconnu fait 47 victimes en Asie avant de se répandre parmi les pèlerins de la Mecque puis, en quelques semaines, dans le monde entier. Henry Parsons, qui a travaillé sur Ebola en 2014, se retrouve coincé au Moyen-Orient pour tenter de contrer ce virus qui fait bientôt des millions de morts et met à mal le fonctionnement de la société humaine. La course contre la montre est lancée pour essayer d'élaborer un vaccin…

Publié en pleine crise sanitaire du SRAS-COV2, ce thriller d'anticipation fait figure de récit prophétique. Effectivement, on peut y voir de nombreux parallèles entre la vague épidémique du Kongoli, ce virus imaginé par Wright, et notre Covid, à l'exception des symptômes du premier, passablement plus gore que ceux que nous connaissons, et de son taux de mortalité bien plus élevé. Mais ce récit amplement et conséquemment documenté, sur les recherches virales mais aussi sur la géopolitique et les relations internationales, dont notamment l'entente toute relative entre les Etats-Unis et la Russie, expose bien le mode de propagation du virus, les risques d'une pandémie mondiale et ses conséquences sur nos sociétés. L'auteur a voulu aborder tous ces thèmes et, à travers eux, la question de l'inexpérience et de l'impréparation de nos gouvernants – en l'occurrence les politiques américains qui se focalisent sur des menaces de terrorisme biologique fomentées par leur ennemi juré. Il en résulte un récit intéressant certes mais qui m'a paru pêcher par excès, avec une narration un peu décousue, un point de vue très américain, une narration inégale et des passages qui m'ont paru relever davantage du roman d'espionnage.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / épidémie / virus / maladie /


Posté le 23/12/2020 à 16:16

L'ami imaginaire, Stephen Chbosky / Trad. de l'anglais. Calmann-Lévy, 08/2020 (Noir). 748 p. **

Christopher et sa mère Kate emménagent dans la petite ville de Mill Grove, en Pennsylvanie, espérant y trouver la paix. Mais Christopher disparaît pour revenir six jours plus tard, apparemment indemne. En apparence seulement : le garçon se met à parler avec une créature invisible, il se guérit de sa dyslexie, et se met en tête de construire une cabane dans la forêt toute proche. Il réussit à convaincre ses quatre copains de l'aider. La cabane enfin construite, Christopher découvre qu'elle est une porte vers le monde imaginaire...

Stephen Chbosky est présenté comme le disciple de Stephen King. Comme lui, il prend le temps de camper une atmosphère, et de montrer la belle relation qui unit Kate à son fils. Le récit tient encore la route quand Christopher découvre un étrange personnage qu'il surnomme le "gentil monsieur", qui lui ouvre les portes du monde imaginaire, qui n'a rien de féérique mais tout de l'enfer. Mais tout se gâte ensuite, avec l'arrivée de multiples personnages dont on ne comprend pas s'ils sont morts ou vivants, bienveillants ou maléfiques, des rebondissements sans queue ni tête qui donnent l'impression que l'auteur a rédigé son roman sans construction aucune, au fur et à mesure de l'inspiration. Il ajoute des épisodes dont on se demande quel est leur intérêt à part rallonger une sauce qui à la longue perd toute consistance jusqu'à devenir parfaitement insipide. Là où Stephen King maîtrise la construction en crescendo d'un récit et sait tenir son lecteur en haleine, Stephen Chbosky se noie dans une histoire malhabile et délirante, qui s'achève sur un happy end brutal et peu crédible.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / enfant /


Posté le 13/11/2020 à 10:08

Cadres noirs, Pierre Lemaître. Le Livre de Poche, 03/2011 (Thriller). 442 p. 7,90 € ****

         Alain Delambre, 57 ans, est cadre au chômage depuis quatre ans. Il vivote d'un travail de manutentionnaire tout en continuant à répondre aux annonces. Enfin, un jour, sa candidature retient l'attention, et il franchit les premières étapes de la sélection. Jusqu'à ce qu'on lui propose de participer à un jeu de rôles mettant en scène une prise d'otages, au cours duquel on testera à la fois les réactions des cadres de l'entreprise destinés à être licenciés, et ses capacités de leader. Malgré le refus choqué de sa femme, il prépare avec acharnement l'épreuve, prêt à tout pour obtenir ce job. Mais une stagiaire remerciée par l'entreprise prend contact avec lui : cette dernière épreuve prend un tout autre aspect…

         Après une première partie très lente, au cours de laquelle on voit à quel point Alain Delambre est à bout et prêt à tout pour retrouver un métier compatible avec sa formation en management, quitte à extorquer de l'argent à sa fille pour rémunérer des enquêteurs chargés de déceler les points faibles des candidats sur la sellette du licenciement, le roman prend enfin son rythme. Nous voici plongés dans la prise d'otages fictive, racontée par l'ancien militaire chargée de l'organiser. Des balles à blanc, des faux morts, tout est fait pour créer chez les cinq cadres convoqués un climat de tension propice à révéler les caractères, dans une vision impitoyable de logique de rendement. C'est alors que Delambre pète les plombs : le scénario conçu par les dirigeants se retourne contre eux et devient plus vrai que nature. Les événements s'enchaînent dans une logique implacable jusqu'à un dénouement attendu… et au rebondissement suivant. Jusqu'où, quand on est aussi acculé que Delambre, est-on prêt à aller pour sauver sa peau et celle des siens ? Quitte à perdre son âme, l'estime de soi-même et devenir finalement aussi monstrueux que ceux dont on a voulu se venger, au sein du monde sans pitié de la grande entreprise.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

entreprise / chômage / dépression / vengeance /



Posté le 30/10/2020 à 17:41

Robe de marié, Pierre Lemaitre. Le Livre de Poche, 01/2020 (Thriller). 314 p. 7,70 € ****

Sophie a tout pour être heureuse : un travail qui lui plaît, un mari qui l'aime et une vie aisée. Mais elle commence à subir des troubles de mémoire, à perdre des objets, se tromper de rendez-vous... Sa vie devient un véritable enfer : deviendrait-elle folle, sombrant dans une dépression paranoïaque ? La mort de sa belle-mère, puis celle de son mari devenu infirme à la suite d'un accident de voiture précipitent les choses. Elle perd son emploi, devient nurse d'un petit garçon dont un matin elle découvre le cadavre. Elle a tué sans se souvenir de rien. Prise de panique elle s'enfuit, et se recrée une nouvelle identité pour échapper à la police. Mais elle ne va pas pouvoir se cacher éternellement.

Pauvre Sophie ! Est-elle folle ? Une dangereuse psychopathe qui tue tous ceux qu'elle n'aime pas, comme son horrible belle-mère ou le petit garçon dont elle avait la garde, ou qui ne supporte plus son mari tétraplégique au point de le précipiter avec son fauteuil dans l'escalier ? Sa folie meurtrière ne s'arrête pas là, car la tueuse en cavale se refait une vie avec un sang-froid impressionnant malgré sa dépression, quitte à devoir commettre d'autres meurtres. Jusqu'à ce qu'arrive dans l'histoire un certain Franz Berg, et que tout bascule. N'avançons pas plus avant dans le résumé d'un thriller psychologique implacable et terrifiant où victime et bourreau s'affrontent dans une lutte sans merci, animée par la soif de vengeance.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

harcèlement / folie / meurtre / vengeance /


Posté le 30/10/2020 à 17:39

L'Institut, Stephen King / trad. de l'anglais. Albin Michel, 02/2020. 598 p. 24,90 € *****

Lire un Stephen King, c'est l'assurance de plonger dans une histoire palpitante qu'on peine à lâcher. Ce dernier opus n'échappe pas à la règle : il commence doucement, au point qu'on se demande, à la fin de la première partie, où ce diable d'auteur veut en venir, avec cet ex-flic un peu paumé qui se retrouve, après un enchaînement de circonstances, veilleur de nuit dans une petite ville perdue de Caroline du Sud. Changement de programme dans la deuxième partie, où Luke Ellis, âgé de 12 ans et à haut potentiel, est enlevé pour être placé dans un institut qui recueille – retient prisonniers – des enfants dotés de pouvoirs de télékinésie ou de télépathie. Ces "TK" ou "TP" comme on les appelle subissent des injections et des tests plus ou moins barbares, ainsi qu'une mise en condition pour participer à une œuvre collective dont on découvrira plus tard les finalités. Luke va alors être l'instigateur d'une révolte au cours de laquelle on retrouvera notre flic veilleur de nuit. Les lenteurs du début, qui sont bien évidemment destinées à mettre en place des éléments indispensables pour la suite, vont céder la place à un emballement progressif du récit, qui tient parfaitement son lecteur en haleine. Les intrigues se croisent, entre la fuite de Luke, le destin des enfants de l'institut et les recherches entamées par son horrible directrice pour retrouver l'enfant, dans une montée en puissance du suspense qui n'est rien moins qu'addictive. Au point de mener le lecteur sur un dénouement absolument apocalyptique, qu'on pourra peut-être trouver quelque peu excessif. Mais ne boudons pas le plaisir d'un très bon thriller !

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / enlèvement / enfants / manipulation / complot /


Posté le 12/10/2020 à 17:10

404, Sabri Louatah. Flammarion / Versilio, 01/2020. 356 p. 21 € ***

       La nouvelle élection présidentielle a vu une femme à la tête de la France. Mais une vidéo la montre subissant un viol lors d'un entretien avec un dirigeant étranger. Vérité ou truquage ? Les moyens techniques se sont si bien développés que désormais la preuve par l'image n'existe plus, et qu'on peut fabriquer des vidéos parfaites, qu'on a baptisées mirages. Allia, ancienne polytechnicienne, a créé une plateforme de diffusion d'images impossibles à truquer, ni même à enregistrer. 404 se développe dans le département de l'Allier et devient bientôt le seul garant de la vérité, dans un climat politique tendu entre Français de souche et immigrés de la troisième ou de la quatrième génération…

       Un thriller socio-politique qui mêle habilement l'histoire personnelle d'Ali, l'amoureux transi de la talentueuse Allia, et les grandes questions sur l'image et son pouvoir dans les milieux influents, qu'il s'agisse de la politique ou des réseaux sociaux, ainsi que les revendications nationalistes ou communautaristes. Une anticipation pas si lointaine mais assez effrayante.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

politique / vidéos / truquage / immigration /


Posté le 12/10/2020 à 17:08

La bête d'Alaska, Lincoln Child / trad. de l'anglais. J'ai Lu, 07/2017. 446 p. 8 € ****

      Une expédition scientifique s'est installée dans une ancienne base militaire au pied du Mont de la Peur, dans la réserve naturelle fédérale de l'Alaska pour étudier les effets du réchauffement climatique. Les scientifiques font une surprenante découverte : le cadavre d'un lion préhistorique figé dans les glaces. Les sponsors de l'expédition dépêchent une équipe de tournage pour filmer l'extraction de l'animal, malgré les mises en garde de la population inuit qui y voit la résurgence d'un esprit maléfique. La veille du tournage, l'animal disparaît…

       Foin du respect des traditions locales et de la crédibilité scientifique : le réalisateur du documentaire est prêt à tout pour faire son film, y compris à filmer des scènes d'horreur quand le premier cadavre est découvert, entièrement lacéré. Il faut toute l'opiniâtreté et l'intelligence des scientifiques pour parvenir à trouver un moyen de lutter contre le prédateur. Certes, le récit regorge de scènes d'horreur dignes des grands succès de série B, et la psychologie des personnages est assez rudimentaires, voire grossière pour ce qui concerne le réalisateur ou la présentatrice vedette qui porte des hauts talons par – 30°, mais il repose sur une solide documentation scientifique et son suspense est bien dosé : un thriller qui se lit avec plaisir.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

glacier / réchauffement climatique / légende / monstre /


Posté le 12/10/2020 à 17:02

La vague, Boyd Morrison / trad. de l'anglais. Bragelonne, 09/2017 (Thriller). 461 p. 7,90 € ****

      Un beau matin au large d'Hawaï, un 747 s'écrase, faisant 375 victimes. Au même moment, des agents du Centre d'alerte tsunami du Pacifique détecte l'arrivée possible d'un tsunami, qui ne semble cependant pas suffisamment dangereux pour justifier l'évacuation de la population. Mais Kai Tanaka, son directeur, redoute quelque chose de plus grave et décide de lancer l'alerte. Il a bien fait : la chute d'un météorite va déclencher une onde de choc gigantesque, et la vague qui s'écrasera sur les côtes hawaïennes risque d'atteindre les 70 mètres. Rien n'y résistera. Kai doit assurer ses fonctions alors que sa fille est à la plage à Waïkiki avec une amie, et que sa femme dirige un hôtel tout proche du front de mer…

     Il faut tout l'instinct de Kai pour décider de lancer une alerte dont les conséquences économiques seront désastreuses, surtout que le tsunami ne semble de prime abord guère menaçant. Nous suivons avec lui les informations qui arrivent au compte-goutte, confirmant l'hypothèse d'une catastrophe d'une ampleur grandissante, tandis qu'en bord de plage, toute la population ne se rend pas immédiatement compte du danger et que certains rechignent à évacuer. La tension monte au fur et à mesure que la première vague se rapproche, bientôt suivie par d'autres vagues, de plus en plus hautes, tandis que nombre de gens se noient et que les immeubles s'effondrent, dans un compte à rebours terrifiant qui rend la lecture addictive. Boyd Morrison ne craint pas de faire vivre à Kai et aux siens des aventures éprouvantes – ils manquent à maintes reprises de se noyer, d'être écrasés, étouffés -, quitte à faire mourir certains personnages. C'est cela, en plus d'une solide documentation et de nombreux détails techniques, qui rend le récit plausible. Le roman se lit comme on regarderait un film catastrophe, avec un sentiment d'effroi et de fascination mêlé. Le tout est fort plaisant, malgré de petites maladresses de traduction.   

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / catastrophe / tsunami / mort / famille /


Posté le 12/10/2020 à 16:52

Tuer le fils, Benoît Séverac. La Manufacture de livres, 02/2020. 281 p. 18,90 € ****

         Pour avoir commis un meurtre, Matthieu Fabas a écopé de quinze ans de prison. Elevé par un père machiste et violent, il a tué pour que son père dise de lui qu'il était un homme. Au lendemain de sa libération, son père est assassiné. Il semble être le coupable tout désigné, mais le commandant Cérisol chargé de l'enquête n'est pas convaincu. Il se plonge dans les écrits que Mathieu Fabas a rédigés pendant sa détention, sous l'égide d'un écrivain qui animait des ateliers d'écriture pour les détenus. Il y est question de la relation complexe entre le père et le fils…

         Au-delà de l'enquête policière, ce roman a deux atouts : il creuse et fouille la relation entre Mathieu et son père, et interroge la question de la filiation. Comment peut-on devenir un homme quand on a grandi en s'entendant insulter et mépriser chaque jour, et qu'on a perdu toute estime de soi ? Comment s'affranchit-on de la nécessité de faire ses preuves ? Par ailleurs, ce récit campe des personnages bien trempés et très caractérisés, notamment l'équipe d'enquêteurs de la SRPJ : Cérisol se régale de pots de confiture dégustés à la cuillère, Nicodemo qui en a plein les bottes de sa famille portugaise, et Grospierre titulaire d'un doctorat en anthropologie et ex-champion interrégional de taekwondo : "Il était aujourd'hui un atout pour le service dont il avait fait chuter la moyenne d'âge, en même temps qu'il en avait augmenté les performances physiques…". Une excellente et désopilante galerie de portraits qui donne de l'épaisseur à une intrigue bien menée.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

famille / prison / manipulation mentale /


Posté le 16/09/2020 à 17:31

.La vie secrète des écrivains, Guillaume Musso. Calmann-Lévy, 04/2019. 344 p. 21,90 € ***

Qu'est-il arrivé à Nathan Fawles, le célèbre écrivain, pour se décider à arrêter d'écrire et s'isoler sur une île sauvage de la Méditerranée ? Trente ans plus tard, Raphaël Bataille, apprenti écricain passionné par Fawles, se rend sur l'île et se fait embaucher par un vieux libraire. Il parvient à entrer en contact avec son idole et se fait rabrouer, ce qui n'est pas le cas de Mathilde Monney, jeune journaliste ambitieuse, qui parvient à se rapprocher de l'écrivain au prétexte de lui rapporter son chien perdu. C'est alors qu'on découvre le cadavre d'une femme sur la plage : les autorités isolent l'île…

         Musso n'a peur de rien. Ni des rebondissements en cascade – le résumé précédent en témoigne – ni des points de vue multiples – Raphaël, Nathan, Mathilde, la presse, etc - ni des clins d'œil à des grands noms de la littérature, dont il revendique la filiation. Le résultat, un polar assez bien ficelé, si on met de côté les invraisemblances sur la psychologie des personnages – un écrivain reclus qui tombe amoureux d'une jeune femme décidée, laquelle a bien des projets en tête qui n'ont rien d'innocents. On appréciera, ou non, le rythme du récit, et son style efficace et sans grande imagination. L'intérêt de ce récit, outre sa dimension thriller qui a fait la célébrité de son auteur, c'est le questionnement sur l'inspiration, le travail de l'écrivain, que l'on retrouve dans les propos de Fawles et dans un dénouement assez surprenant.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

île / écrivain / vengeance /

Posté le 16/09/2020 à 17:20

Siège 7A, Sebastian Fitzek / trad. de l'allemand. L'Archipel, 03/2020. 367 p. 22 € ***

         Nele s'apprête à accoucher par césarienne, à cause de sa séropositivité. Son père Mats, avec lequel elle est brouillée, prend l'avion de Buenos Aires pour la retrouver, malgré sa phobie des transports aériens. Mais Nele est enlevée, et ne sera libérée que si Mats, qui est psychiatre, accepte de collaborer avec des terroristes et de transformer l'une des hôtesses de l'air, une de ses anciennes patientes, en véritable bombe humaine…

         Un vrai thriller truffé de rebondissements et de fausses pistes, dans lequel chaque chapitre s'achève sur un cliff hanger insoutenable. A la longue, c'est un peu fatigant : il y a la situation de Nele, enfermée dans une ancienne salle de traite, séquestrée par un jeune homme qui ne supporte pas la souffrance faite aux vaches auxquelles on enlève leur petit pour récupérer leur lait ; le huis clos dans l'avion, au cours duquel le psy se voit contraint de bafouer le serment d'Hippocrate tout en luttant contre son aviophobie et en craignant pour la vie de sa fille ; le traumatisme subi par la patiente de Mats quelques années plus tôt ; l'enquête que mène sa consoeur et ancienne amante à Berlin pour retrouver Nele ; la séropositivité ; enfin l'objet de la brouille entre père et fille. N'en jetez plus ! A vouloir entretenir le suspens, l'auteur nous livre un roman excessif dont la complexité se résout comme par magie, dans un dénouement façon Hercule Poirot qui défait tous les nœuds de l'intrigue. Un moment de lecture pas désagréable, mais dont on sort un peu gavé.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Allemagne / famille / accouchement / avion /


Posté le 06/08/2020 à 17:58

Le braconnier du lac perdu, Peter May / trad. de l'anglais. In La Trilogie écossaise, Le Rouergue (Noir), 10/2014. 1008 p. 26,90 € *****

         Troisième et dernier volet des aventures de Fin Mcleod, revenu sur son île natale de Lewis, dans les Hébrides à l'extrême nord-ouest de l'Ecosse, après 17 ans d'absence. Dans cette troisième partie, Fin, qui vit avec Marsaili, son amour d'enfance dont il a eu un fils, se fait embaucher comme chef de la sécurité chez un grand propriétaire et se voit obligé de surveiller les gestes de son ami d'enfance surnommé Whistler, qui se livre au braconnage. Abrités au bord d'un lac pour échapper à une tempête, les deux amis découvrent au matin le lac entièrement vidé suite à une coulée de la tourbière et, au fond, un petit avion qui contient le corps de leur ami Roddy McKenzie, disparu 17 ans plus tôt. Il ne semble pas avoir été victime d'un accident mais bel et bien assassiné…

         J'avais lu les deux tomes précédents chez Babel, mais me suis offert La Trilogie écossaise. Cette œuvre en trois parties fait la part belle à la nature sauvage de ces régions septentrionales au climat parfois féroce, le vent qui fouette le visage, la mer implacable, les cieux noirs et menaçants, la pluie horizontale et la fumée des feux de tourbe. Une vie rude avec laquelle on compose. Comme à chaque fois, les enquêtes de Fin, si elles conduisent à la découverte du meurtrier et de son mobile, sont surtout un moyen de mener une quête personnelle – pour le plus grand plaisir des lecteurs.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Ecosse / meurtre / musique / jalousie / deuil /


Posté le 27/07/2020 à 16:41

Les disparus du phare, Peter May / trad. de l'anglais. Actes Sud, 01/2019 (Babel Noir). 422 p. 9,80 € *****

         Retour aux îles des Hébrides dans cet autre polar de Peter May. Cette fois, il met en scène un homme qui reprend connaissance sur la plage de l'île de Lewis, complètement amnésique. Grâce à l'intervention d'une voisine, il retrouve sa maison, un couple d'amis, son nom – qui ne lui dit évidemment rien –, son chien et un projet de roman inabouti. Rien de plus. Il décide de partir à la recherche de lui-même, en se basant sur les maigres indices qu'il a pu trouver chez lui : une carte et un ouvrage sur les îles Flannan où trois gardiens de phare ont mystérieusement disparu.

         Que recèlent ces îles ? Pourquoi Lean Mclean élève-t-il des abeilles et possède-t-il un véritable laboratoire d'études dans cette maison de location ? Que s'est-il passé de dramatique pour qu'il perde ainsi la mémoire ? De fausses pistes en rebondissements, Pater May nous entraîne dans les pas d'une quête personnelle, tout en faisant comme dans tous ses romans écossais la part belle à la nature sauvage, au vent, aux pluies, aux couleurs changeantes des lochs ; au-delà de l'intrigue policière, il fait la preuve une fois encore de son talent à nous faire voir l'âpre beauté de ce coin de l'extrême nord-ouest de l'Ecosse. S'y ajoute la thématique de l'environnement à travers le sort des abeilles, victimes des lobbies de l'industrie agro alimentaire.

 

Catégorie: Romans policiers / Thrillers

Ecosse / amnésie / écologie / abeilles /


Posté le 21/07/2020 à 10:08

L'énigme de la chambre 622, Joël Dicker. De Fallois, 03/2020. 569 p. 23 € *****

         Joël Dicker a décidé de s'atteler à son nouveau roman. Pour l'écrire, et se guérir d'une récente rupture amoureuse, il décide de s'installer au Palace de Verbier. Il y fait la connaissance d'une charmante jeune femme qui s'improvise assistante et l'aide à réunir de la documentation sur un mystérieux fait divers qui a eu lieu quelques années plus tôt dans cet hôtel : un homme a été retrouvé mort dans la chambre 622, sans qu'on n'ait jamais pu identifier son meurtrier.

         Voilà une intrigue à tiroirs, qui fait le va-et-vient entre l'époque de la rédaction du roman, les jours précédant le meurtre, et la mise en place des différents acteurs du drame une quinzaine d'années plus tôt. La complexité du récit qui se passe dans le milieu feutré des banques suisses est heureusement facilitée par les mentions de date, sans lequel le lecteur, qui doit jongler avec les points de vue et les époques, serait définitivement perdu. L'auteur joue avec ces sauts dans le temps, avec le nombre de personnages, et s'amuse à se mettre en scène, dans une mise en abime qui voit son apothéose dans les dernières pages. On trouvera dans cet ample roman où tout s'emboîte un hommage à Bernard de Fallois décédé au début de l'année 2018, et un clin d'œil à Belle du Seigneur dans le dénouement. C'est rudement bien fait, très intelligemment construit.

         Ce roman suscite des avis plus que partagés : soit on aime, soit on déteste, au vu des commentaires découverts sur Babelio après avoir posté mon propre avis. On déplore les personnages féminins dépeints de façon extrêmement avilissante, on déplore une intrigue complexe aux rebondissements peu crédibles ; on déplore la longueur de l'opus et les digressions inutiles. Pour ma part, je persiste et signe, c'est une très bonne lecture, et je suis admirative du talent de Joël Dicker d'avoir construit une telle intrigue.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Suisse / meurtre / enquête / écriture / roman / amour / banque /


Posté le 18/07/2020 à 18:08

Les fleurs de l'ombre, Tatiana de Rosnay. Robert Laffont / Héloïse d'Ormesson, 03/2020. 330 p. 21,50 € ***

         Clarissa Katsef, écrivain, vient de rompre avec son mari après lui avoir découvert une liaison. En quête d'un appartement, elle est retenue pour emménager dans une somptueuse résidence où tout est fait pour préserver le calme propice à la création artistique. Elle ne se sent cependant pas à l'aise dans cet atelier du 8ème étage où tout est conçu pour lui apporter un maximum de confort, à commencer par son assistant domestique, qu'elle a baptisée Mrs Dalloway, en hommage à Virginai Woolf. Elle a le sentiment d'être épiée en permanence, et commence à soupçonner de la malveillance de la part de CASA, la société en charge de la résidence. Ne deviendrait-elle pas paranoïaque ?

         Clarissa s'est spécialisée dans l'empreinte que les humains laissent dans les lieux où ils sont vécu. Dans cet appartement flambant neuf, nulle trace ne devrait subsister, mais l'endroit n'a rien de neutre. A commencer par cet assistant de domotique ultra perfectionné, dont le paramétrage s'est fait via un questionnaire plus qu'indiscret. Projetant d'écrire son nouveau roman en travaillant sur son biliguisme, l'écrivaine s'enferme dans les toilettes pour travailler, puisque c'est le seul endroit où il n'y a pas de caméra. Elle ne va finalement pas beaucoup avancer, et mener une enquête pour découvrir ce qui se cache derrière le mécénat supposé de CASA, aidée par un charmant voisin qui nourrit les mêmes doutes qu'elle. Ce thriller psychologique est bien amené, et mêle les tentatives de Clarissa pour découvrir la vérité et une quête personnelle ; il évoque également le contexte du réchauffement climatique qui a vu la disparition de la végétation remplacée par des plantes artificielles, la disparition de la Tour Eiffel après des attentats, et le développement de l'intelligence artificielle ; il rend hommage aux deux grandes figures de la littérature que sont Romain Gary et Virginia Woolf. Mais peut-être pèche-t-il par excès : le voisin disparaît sans qu'on ne sache jamais ce qu'il est devenu, et le dénouement laisse un goût d'inachevé.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

écrivain / lieu de vie / expérience /


Posté le 15/07/2020 à 10:56

Joueuse, Benoît Philippon. Equinox / Les Arènes, 03/2020. 357 p. 18 € ****

         Zack est joueur de poker professionnel, tout comme son meilleur ami Baloo, qui déteste les auteurs de violences faites aux femmes. Tous deux se font de l'argent et projettent de régler son compte à un proxénète à la tête d'un énorme réseau de prostitution. Mais le projet va devoir attendre, Zack se voit proposer par Maxine, également joueuse hors pair, une alliance visant à faire tomber un homme politique célèbre. Dans quel guêpier Zack s'est-il fourré, tombé sous le charme vénéneux de la jeune femme ?

         Des parties de poker arrosées et enfumées dans des chambres froides, des tricheurs impénitents, du bluff, de l'intimidation et de la violence, l'ambiance est au rendez-vous. Certes, la psychologie de ses personnages est assez simple, le style sans fioritures particulières, et on n'évite pas les poncifs des tables de jeu, mais peu importe. Ce roman plein de rebondissements est jubilatoire : si Zack se prend des coups, et non des moindres, c'est pour mieux tacler son adversaire, tandis que Maxine met à mal – au jeu et en vrai – les machos les plus endurcis, et on a plaisir à suivre leurs mésaventures au cours desquelles les méchants finissent par être punis.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

jeu / vengeance / pari /


Posté le 15/07/2020 à 10:55

Le douzième chapitre, Jérôme Loubry. Calmann-Lévy, 03/2020 (Noir). 356 p. ****

David et Samuel se connaissent depuis l'enfance, depuis qu'ils passent leurs vacances d'été dans une station balnéaire qui accueillent chaque année les familles des ouvriers de l'usine. Ils y ont fait il y a trente ans la rencontre de Julie, et formé avec elle un trio inséparable. Jusqu'au jour où Julie a disparu. Devenus adultes, écrivain renommé pour l'un, éditeur pour le deuxième, les deux hommes ont enveloppé n'ont jamais plus évoqué ce drame. Jusqu'au jour où chacun reçoit un manuscrit qui relate les événements de cet été 1986, qui les met en scène et remue leurs souvenirs...

Qu'est-il arrivé à Julie ? Le manuscrit ne le dit pas, auquel il manque un douzième chapitre. Le mystère s'épaissit d'autant plus qu'une troisième version a été envoyée à quelqu'un d'autre. A qui ? Dévoile-t-elle le dénouement ? Il appartient aux deux hommes de retrouver le contenu de ce douzième chapitre, une tâche qui se complexifie d'autant plus qu'apparaissent de nouveaux personnages qui prennent tour à tour place sur l'échiquier : l'animateur de la salle de jeux vidéos, le second couteau employé par le patron de l'usine, une gouvernante trop gentille pour être honnête, une deuxième petite fille… On pourrait s'y perdre, mais l'auteur mène parfaitement son intrigue, et campe des atmosphères propices au suspense, entre glauque et revendications sociales.  

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

vacances / disparition / passé / secret /


Posté le 06/07/2020 à 18:27

Cinq cartes brûlées, Sophie Loubière. Fleuve Noir, 01/2020. 342 p. 19,90 €. ****

Une petite fille aimée par son papa qui joue avec elle à la petite bête qui monte, tourmentée par un grand frère cruel qui ne cesse de l'humilier, et négligée par une mère dépressive. Laurence Graissac grandit et mange, se gave, se remplit pour oublier le départ de ce père qu'elle affectionnait. Son surpoids augmente les moqueries de son frère, jusqu'au jour où elle découvre la boxe. Devenue championne olympique, elle pourrait tenir là sa revanche, mais Laurence chute encore, et redevient obèse. Un cercle infernal dont seule une nouvelle donne pourrait la faire sortir...

         Bonne ou mauvaise pioche, chaque étape de la vie de Laurence est introduite par une carte : le sept de cœur symbolise l'indécision, la dame de trèfle la venue d'une personne nuisible, le dix de pique une période d'obscurité, l'as de trèfle le dépassement de soi, le quatre de cœur une déception ou une trahison… On sait dès le début qui est la dame de trèfle, et ce roman pourrait être celui d'une petite sœur qui n'a cessé, malgré tous les tourments qu'il lui a fait subir, d'aimer son grand frère. Mais Sophie Loubière a d'autres atouts dans son jeu, et y ajoute d'autres cartes qui font évoluer la partie, jusqu'à un dernier pli surprenant et remarquablement amené.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

famille / maltraitance / femme / folie /


Posté le 06/07/2020 à 18:26

Chez nous, Louise Candlish / trad. de l'anglais. Sonatine, 03/2020. 470 p. 22 € ***

Après que Fiona a découvert son mari Bram en pleine activité extraconjugale dans la cabane du jardin, le couple se sépare. Mais les Lawson parviennent à s'entendre et à partager leur balle maison de Trinity Avenue, au sud de Londres, afin que les enfants ne souffrent pas de la rupture. Tout se passe bien jusqu'au jour où, rentrant chez elle, Fi découvre que tous ses meubles ont disparu et qu'un nouveau couple est en train de s'y installer, prétendant avoir acheté la maison en toute légalité. Bram est injoignable et semble avoir disparu de la circulation. De quelle mauvaise farce Fi est-elle la victime ?

Fi décide de témoigner sur le site La Victime, un podcast consacré aux affaires criminelles, tandis que Bram a quitté l'Angleterre et loge dans une chambre d'hôtel. Victime et coupable donnent chacun sa version de l'histoire, étape par étape. La première est présentée, et reste une personne abusée, qui subit la logique implacable d'une machination ourdie contre elle. Le second a tout manigancé, mais les éléments qu'il distille dans sa confession le dédouanent en partie et font comprendre très vite au lecteur qu'il n'est pas le monstre que l'on imaginait. Ce récit à deux voix se lit agréablement mais il ne recèle pas le suspense attendu dans un thriller psychologique ; l'intrigue paraît parfois un peu grossière, et ce n'est pas le rebondissement final révélé par Fi qui y change grand-chose.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Angleterre / couple / divorce / chantage / accident /


Posté le 06/07/2020 à 18:25

L'homme de Lewis, Peter May / trad. de l'anglais. Babel noir, 01/2013. 380 p. 8,50 € *****

Deuxième tome de la "Trilogie écossaise". Fin Lacleod a quitté la police et décidé de revenir vivre sur son île natale de Lewis, où il entreprend de rénover la maison de ses parents. Mais on découvre le cadavre d'un jeune homme dans la tourbière, mort une cinquantaine d'années plus tôt. Très vite, on le relie à Tormod MacDonald, le père de Marsaili, l'amour de jeunesse de Fin. Atteint d'Alzheimer, Tormod risque d'être soupçonné de meurtre. Fin va mener une enquête officieuse auprès de Gunn, le policier chargé des recherches.

         On retrouve dans ce deuxième tome tout ce qui a fait le charme et la spécificité de L'île des chasseurs d'oiseaux : la beauté sauvage des paysages, la vie rude des habitants, une enquête qui sert de support à l'exploration du passé du protagoniste, des personnages fragiles et touchants. A travers les souvenirs du vieux Tormod, on découvre le drame des enfants orphelins confiés, dans les années 50, à des familles qui les exploitaient, et on comprend un peu mieux comment fonctionne l'esprit d'un malade d'Alzheimer. Une valeur sûre, amoureux de l'Ecosse ou pas.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Ecosse / orphelins / Alzheimer /


Posté le 13/05/2020 à 09:41

L'île des chasseurs d'oiseaux, Peter May / trad. de l'anglais. Babel noir, 11/2011. 423 p. 9,70 € *****

Premier tome de la "Trilogie écossaise". Fin Macleod, inspecteur à Edimbourg, vient de perdre son fils dans un accident de voiture. Il se rend sur son île natale de Lewis, dans l'archipel des Hébrides extérieures, au nord-ouest de l'Ecosse, afin d'enquêter sur la mort d'un habitant pendu et éviscéré. Il s'agit d'un ancien camarade de classe, une brute épaisse dont Fin avait été le souffre-douleur. A travers son enquête, Fin retrouve d'anciennes connaissances, un amour d'enfance, des traditions d'un autre âge, notamment la chasse annuelle aux gugas, les oiseaux nicheurs de l'île inhospitalière d'An Sgeir, et replonge dans un passé qu'il avait fui. Car l'important se situe davantage dans cette quête de son passé que dans l'enquête menée par Fin : à travers ses pérégrinations, ses interrogatoires, c'est toute sa propre histoire qu'il interroge. Un moyen sans doute, pour ce père en deuil, de se redécouvrir et de faire la paix avec ses fantômes. Cette recherche de soi se passe dans un paysage somptueux, battu par des vents incessants qu'endurent avec constance moutons et habitants, aux rochers fracassés par les vagues, aux cieux changeants, imprévisibles et violents. Peter May transporte son lecteur dans un univers fascinant de sauvagerie et de beauté, et nous le donne à voir avec talent.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Ecosse / tradition / gaélique /


Posté le 13/05/2020 à 09:40

Playground, Lars Kepler / trad. du suédois. Babel noir, 01/2019. 407 p. *****

         Après avoir subi un arrêt cardiaque suite à un accident au cours d'une mission militaire, Jasmine Pascal-Anderson est atteinte de stress post traumatique. Elle est persuadée d'avoir découvert un autre monde où transitent les morts. Un monde où règne une mafia toute puissante et dans lequel il faut lutter pour ne pas mourir une deuxième fois. Cinq ans plus tard, elle est victime avec son fils d'un grave accident. Le petit doit subir une lourde intervention qui nécessite d'arrêter son cœur. Comment va-t-il trouver son chemin dans ce monde des ténèbres et revenir à la vie ? Jasmine décide de se plonger dans un coma artificiel pour l'aider.

         Lars Kepler ne s'attarde pas sur le thème de la vie après la mort ou des EMI. Ce qui l'intéresse, c'est de mettre en scène un monde étrange, crépusculaire, d'inspiration fortement asiatique, où les gens pas tout à fait morts sont pesés et se voient délivrer une plaque, passeport pour l'au-delà ou pour un retour à la vie. Dans cette ville tentaculaire et surpeuplée, il n'y a ni jour ni nuit, le temps y passe bien plus vite que dans la vie, les gens survivent comme ils peuvent, mangent mais ne dorment jamais, et surtout essaient d'échapper à la triade qui récupère les plaques des plus jeunes afin de permettre à quelques privilégiés de revenir à la vie dans un corps tout neuf. Le soldat Pascal-Anderson va devoir faire appel à ses reflexes, se battre et tuer, dans une véritable épopée avec de multiples rebondissements et un rythme haletant, et découvrir que même dans l'antichambre de la mort, l'homme reste ce qu'il est, capable d'humanité ou de la pire perversité.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

mort / au-delà / famille /


Posté le 13/05/2020 à 09:27

N'éteins pas la lumière, Bernard Minier. Pocket, 02/2015. 700 p. ***

         Christine Steinmeyer, célèbre animatrice de radio trouve une étrange lettre dans laquelle une jeune femme annonce son suicide. C'est le soir de Noël, il lui est impossible de trouver son auteur. Le lendemain, un auditeur lui reproche en direct de ne pas être intervenue. Très vite, elle se sent menacée, on s'introduit dans son appartement, on pirate sa boîte mail. Personne ne la croit, ni la police, ni son employeur qui suspend son activité, ni son compagnon. La voilà complètement seule. Pendant ce temps, Martin Servaz se remet doucement de sa dépression dans un centre de repos. Le suicide d'une jeune artiste lui paraît louche, il se met à enquêter "en off".

         Evidemment, Martin Steinmeyer va rencontrer Christine Steimeyer, au terme d'une enquête semée de fausses pistes. Certains détails m'ont chiffonnée : il m'a paru peu probable qu'une femme dotée de l'aura de Christine Steinmyer, animatrice vedette de Radio 4, LA radio de la région toulousaine, ait si peu d'amis et se retrouve seule une fois que son compagnon et son employeur lui ont tourné le dos ; la forte tête de Mila Bolsanski, astronaute hyper douée, devient brusquement bien fragile ; enfin Servaz a des intuitions rien moins que surnaturelles. Néanmoins le roman se lit avec plaisir et une certaine impatience.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Toulouse / espace / folie / vengeance /


Posté le 13/05/2020 à 09:25

Les filles oubliées, Sara Blaedel / trad. de l'anglais. Terra Nova, 11/2015. 317 p. ****

         On retrouve le corps d'une femme dans une forêt danoise, au visage défiguré par une grosse cicatrice de brûlure. C'est une ancienne pensionnaire d'un hôpital pour enfants handicapés. Louise Rick, chargée de l'enquête, découvre alors que d'après l'état civil cette femme est morte depuis trente ans, ainsi que sa sœur jumelle.

       Les pensionnaires de l'hôpital psychiatriques étaient surnommés les enfants oubliés. Parce que la plupart du temps leurs familles cessaient très vite de leur rendre visite, soulagées de ne plus avoir à s'en occuper. Ces enfants étaient certes nourris et logés, mais subissaient également des sévices terribles, peut-être parce que l'on estimait qu'ils n'étaient pas assez intelligents pour ressentir la douleur, et qu'ils étaient quantité négligeable. Des pratiques médicales révolues que ce roman bien fait met en lumière, et qui ne sont pas l'apanage du Danemark.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Danemark / hôpital psychiatrique / handicap / maltraitance /


Posté le 13/05/2020 à 09:20

L'île du serment, Peter May / trad. de l'anglais. Actes Sud, 06/2016 (Babel Noir). 9,80 € *****

       Archipel de la Madeleine, à l'est du Canada. Sur l'île d'Entrée, la seule de l'archipel où on parle anglais alors que les autres sont francophones, James Cowell est retrouvé assassiné. On y envoie une équipe policière, dont Sime McKenzie, en raison de son bilinguisme. Il est notamment chargé d'interroger la veuve de la victime, et éprouve le curieux sentiment de la connaitre. Tout accable la jeune femme, ce qui afflige Sime convaincu de son innocence. 

        L'enquête policière dans ce milieu insulaire et préservé, que les jeunes générations désertent peu-à-peu, se double d'une quête personnelle. Affligé d'insomnies chroniques depuis la séparation d'avec sa femme, membre de l'équipe policière, Sime est épuisé et peine à garder les idées claires. Les quelques minutes de sommeil qu'il parvient à gagner le plongent dans les rêves où son ancêtre, dont il porte le nom, quitte son Ecosse natale et la famine 150 ans plus tôt pour se retrouver au Canada, perdant la femme qu'il aime et qui ressemble si curieusement à Kisty Cowell. Le récit prend ainsi une connotation qui frôle le fantastique, laquelle s'accorde parfaitement avec le décor, tout en embruns, en vents et en mer déchaînée, où les conditions de vie sont dures mais la nature sauvage et belle si on sait l'apprécier. L'ensemble est plutôt convaincant.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Canada / nature / migrants / 19ème siècle / île /


Posté le 12/05/2020 à 18:08

Mon territoire, Tess Sharpe / trad. de l'anglais. Sonatine, 08/2019. 551 p. 23 €. ****

Harley Jean est la fille du redoutable Duke McKenna, à la tête d'un immense réseau criminel en Californie du Nord. Elle perd sa mère à 8 ans dans de terribles circonstances. Son père prend alors en charge son éducation, à sa façon, c'est-à-dire qu'il l'élève à la dure, l'enferme dans un coffre de voiture, lui apprend à chasser, à se battre, et fait d'elle un parfait tireur d'élite. Vient le jour où elle doit lui succéder…

         Certes, Harley est imbattable, et capable de coller une balle dans l'œil d'un type à 50 mètres. Certes, elle s'est endurcie, et sait parfaitement de qui elle tient. Mais elle tient aussi de sa mère, et si elle accepte de reprendre les rênes de l'empire mafieux des McKenna, c'est surtout parce qu'elle veut entretenir le Ruby et protéger les Rubinettes, ces femmes victimes de violences conjugales qui trouvent refuge dans cet ancien motel. Se débarrasser de la meth qui a envahi tout le Comté. Et surtout de Springfield, qui dirige le clan au-delà de la rivière et qui est responsable de la mort de sa mère. Elle échafaude donc un plan, qu'elle va mettre en œuvre en une journée, tandis que son père se meurt en secret à l'hôpital. Avec l'idée fixe d'obtenir le respect dans ce monde d'hommes – pas seulement pour elle, mais toutes les femmes - et de faire les choses à sa manière. Entre chaque rebondissement de cette longue journée, elle raconte son passé par bribes, et révèle une personnalité à la fois humaine et terriblement dure. Girls don't cry, elle lutte pour garder la tête haute sans céder à la violence paternelle. On ne peut s'empêcher d'y trouver un côté un peu insistant ou répétitif dans ce combat qu'elle mène contre elle-même, afin de garder sa part humaine face au mal absolu. Mais l'héroïne est attachante, et le récit bien fait, une sorte de western noir et contemporain qui tient en haleine sans faiblir au long de ses 551 pages.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

drogue / Etats-Unis / femme / armes /


Posté le 27/01/2020 à 15:20

L'ombre de la menace, Rachel Caine / trad. de l'anglais. L'Archipel, 09/2019. 332 p. 20,99 € ****

         Une voiture défonce le garage de la maison de Gina et Melvin Royal. L'accident révèle que la pièce, parfaitement calfeutrée, servait en réalité à Melvin de salle de torture pour des atrocités commises sur de jeunes femmes, dont Gina ignorait tout. Elle est condamnée pour complicité puis relâchée, mais doit fuir avec ses enfants pour échapper au harcèlement d'une partie de la population persuadée de sa culpabilité. Quatre ans plus tard, devenue Gwen Proctor, elle s'est installée à Stillhouse Lake, une petite bourgade tranquille où elle pense pouvoir rester, tout en continuant quotidiennement à surveiller les cyberharceleurs. Mais la découverte d'un cadavre dans le lac attire de nouveaux soupçons sur elle…

         Comment Gina a-t-elle pu ainsi tout ignorer de la perversité absolue de son mari, qui donnait libre cours à ses pulsions dans sa maison même, et pendant des années ? La police aura bien du mal à croire en une telle naïveté, et bien qu'elle finisse par être acquittée, personne ne sera jamais convaincu de son innocence. Ce n'est pas seulement pour fuir les harceleurs, mais aussi pour échapper à ce doute permanent et tenter d'entamer une nouvelle vie vierge de tout soupçon que Gina devient Gwen. Evidemment, on ne peut jamais échapper à son passé, qui vous rattrape malgré toutes les précautions dont vous pouvez vous entourer – et celles de Gina-Gwen sont dignes d'un espion ou d'un agent du FBI. La méfiance des habitants, qui découvre sa véritable identité, peut-être compréhensible, mais l'acharnement de certains confine à la folie et déclenche une véritable chasse à la femme dont le rythme s'accélère et tient le lecteur en haleine. C'est dire si le roman est plutôt bien construit, malgré quelques invraisemblances, jusqu'à un dénouement final en apothéose au fond des bois.

 

Catégorie : Romans policiers / Polars

harcèlement / tueur en série / psychopathe / famille /


Posté le 26/01/2020 à 11:51

Un couple irréprochable, Alafair Burke / trad. de l'anglais. Presses de la Cité, 09/2019. 428 p. 21 € ***

         Angela Powell a tout pour être heureuse : après des années de vie modeste en tant que traiteur, elle a épousé Jason Powell, célèbre économiste auteur d'un essai à succès, et mène une vie paisible et oisive avec leur fils de 13 ans. Mais son bonheur vole en éclats lorsque Jason est accusé de harcèlement sexuel par l'une des stagiaires de son cabinet. Les choses empirent lorsqu'une femme avec laquelle il avait une liaison porte plainte pour viol. Mais Angela est décidée à défendre son mari, bien que son passé et le secret qu'elle tente de préserver risquent d'être utilisés contre elle.

         Encore un roman qui surfe sur la vague Me Too, me suis-je dit. Un de ceux où la femme est présentée comme victime et l'homme comme un prédateur incapable de contrôler ses pulsions. Corrinne, une inspectrice afro américaine, ainsi que Susanne, journaliste très populaire amie d'Angela, semblent toutes deux fermement décidées à ce que la jeune femme renonce à croire en l'innocence de son mari. Heureusement l'histoire échappe à un manichéisme simpliste et prend la forme d'une enquête extrêmement détaillée, qui donne les arguments des deux parties. L'auteur, qui a longtemps exercé en tant que procureure, connait parfaitement les arcanes du droit américain et ses spécificités - le principe du grand jury qui permet au témoin d'être affranchi de toute accusation, la réserve conjugale qui permet au conjoint de ne pas répondre à certaines questions – et ne nous épargne rien de l'avancée complexe de l'affaire. C'est long, et fait penser à ces films où sont filmés des procédures judiciaires qui vont dire aux prévenus, devant un tribunal français, Votre Honneur au président du tribunal. A l'inverse, le dénouement est extrêmement rapide, comme si l'auteur avait voulu se débarrasser au plus vite d'une histoire om finalement, le but était moins de montrer la perversité masculine que la nature retorse de l'âme humaine qui se cache derrière les jeunes femmes les plus innocentes.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Etats-Unis / harcèlement / procès / famille /


Posté le 26/01/2020 à 11:20

Les refuges, Jérôme Loubry. Calmann-Lévy, 10/2019 (Noir). 391 p. 19,90 € *****

         Un professeur d'université présente à ses étudiants un cas psychiatrique de "refuge psychologique" : en 1986, Sandrine Vaudrier, jeune journaliste, doit se rendre sur une île normande pour aller vider la maison de sa grand-mère qui y vivait en compagnie de quelques originaux. Elle découvre alors qu'une tragédie est arrivée en 1949, quand on a créé sur l'île un camp de vacances destiné aux enfants victimes des horreurs de la guerre. Les enfants se sont tous noyés lors d'une sortie en mer. Quel rôle ont joué les habitants de l'île dans ce drame ? Sandrine est retrouvée quelques jours plus tard errant sur la plage, profondément choquée. Son histoire amène les enquêteurs à découvrir que ce camp de vacances n'a jamais existé…

         Voici donc un cas d'école : qu'a vraiment vécu Sandrine, qui l'a poussée à se réfugier dans une histoire inventée ? Le travail de l'inspecteur, secondé par une psychiatre, va consister à repérer les "balises", c’est-à-dire de débusquer les éléments réels du récit de la victime, pour ramener à sa conscience les faits qu'elle a enfouis au plus profond de sa mémoire. Ce processus donne à voir une toute autre vérité, mais ce phénomène de déni ne donnerait lieu qu'à une simple révélation s'il ne cachait pas à son tour une vérité encore plus dérangeante. C'est alors que le roman prend tout son sens : les refuges s'emboîtent comme des poupées russes, pour donner jour à une véritable énigme que le professeur Villemin présente à ses étudiants et qui invite le lecteur à ne pas se laisser prendre au piège de l'interprétation facile. Voilà le lecteur tout aussi perplexe que les étudiants en psychologie, et il faut toutes les clés de l'enseignant pour parvenir à comprendre ce mécanisme complexe qu'est le déni. Jérôme Loubry distille les éléments de réponse et les effets de surprise avec brio.

Catégorie : Romans policiers / Polars

déni / psychologie / secret / traumatisme / séquestration /

Posté le 26/01/2020 à 11:17

La mort de Mrs Westaway, Ruth Ware. Fleuve noir, 09/2019. 431 p. 19,90 € ****

Harriet Westaway, surnommé Hal, vivote à Brighton en exerçant ses talents de cartomancienne hérités de sa mère, laquelle est décédée abruptement. Aux abois et sous la menace d'un créancier peu scrupuleux elle reçoit alors un étrange courrier l'informant du décès de sa grand-mère et de son statut d'héritière d'un gros patrimoine immobilier. Persuadée qu'il s'agit d'une erreur, puisqu'elle n'est pas la petite-fille d'Hester mais sa petite nièce, elle se rend tout de même aux obsèques d'Hester Westaway, et fait la connaissance de ses oncles sans avouer la supercherie…

         Comment Hal va-t-elle tenir sur la longueur, et accepter sciemment de spolier ses oncles et cette nouvelle famille au demeurant fort sympathique, alors qu'elle n'en a plus ? Le récit, entrecoupé des extraits du journal intime de la mère de Hal, permet au lecteur de comprendre petit à petit que la jeune femme n'est pas la profiteuse qu'elle pourrait être. Et puis il y a le fantôme de la sœur des oncles, disparue corps et biens, qui était très proche de la mère de Hal… Au-delà du polar psychologique, ce récit décrit également avec talent l'Angleterre contemporaine, les classes populaires et aisées, et brosse le portrait d'une famille où règnent de nombreux non dits. Mrs Westaway, la défunte propriétaire, est par définition absente du récit, mais très présente à travers le personnage de sa gouvernante acariâtre, et à travers ses principes d'économie qui font que le magnifique château dont Hal hérite n'est pas chauffé et tombe en décrépitude absolue ; elle incarne une aristocratie désuète dont la main de fer pèse encore sur ses descendants.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Angleterre / famille / héritage / secret /

Posté le 26/01/2020 à 11:16

L'homme craie, C.J.Tudor / trad. de l'anglais. J'ai Lu, 04/2019. 442 p. 8 € ****

1986. Eddie Adams, surnommé Eddie Munster, 11 ans, traine avec sa bande de copains : Gros Gav, Mickey Métal, Hoppo et Nicky. Ils ont mis au point un système de communication secret à base de bonshommes bâtons dessinés à la craie. Un jeu innocent qui s'avère pervers lorsque divers événements dramatiques vont troubler la quiétude de l'été : une jeune fille est très gravement blessée par la chute d'un manège, puis un corps démembré et sans tête est retrouvé dans la forêt. Sur la scène de crime, des bonshommes bâtons semblent indiquer où se trouvent les différentes parties du corps. Le professeur d'Eddie est accusé. Trente ans plus tard, les démons du passé refont surface et viennent briser le quotidien d'Eddie...

A 42 ans, Eddie est célibataire et enseigne l'anglais. Il partage la maison familiale avec une jeune femme gothique à laquelle il est plus attaché qu'il ne pense. Un peu paumé, un peu désabusé, il retrouve ses vieux copains qui contrairement à lui semblent avoir tiré un trait sur le passé. Eddie ne se pardonne pas certaines erreurs qu'il a commises, et sans doute espère-t-il, en essayant de retrouver les traces de cet homme craie surgi du passé, faire la paix avec ses fantômes. Les souvenirs reviennent petit-à-petit, et lui permettent de faire la lumière sur ce qui s'est réellement passé trente ans plus tôt. L'alternance entre passé et présent est habile, le roman bien construit et plaisant. 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

amitié / adolescence / vengeance / Angleterre /

Posté le 11/12/2019 à 14:55

La disparition d'Annie Thorne, C.J. Tudor / traduit de l'anglais. Pygmalion, 04/2019. 403 p. 21,90 €. *****

Joseph Thorne est embauché comme professeur d'anglais dans un lycée d'une petite ville perdue du Nottinghamshire. Grandement désargenté suite à de nombreuses dettes de jeu, il doit retrouver un travail, même si ce n'est pas là sa principale motivation. En effet, il a passé son enfance dans la région, qu'il a quittée suite à l'accident de voiture qui a coûté la vie à son père et à sa sœur. Sa petite sœur qu'il chérissait et qui avait disparu un soir avant de revenir 48 heures plus tard, complètement différente…

Thorne est l'anti héros par excellence : solitaire, mal léché, passablement alcoolique et dépressif. Après avoir reçu un email anonyme, il revient 20 ans après sur les lieux de son enfance pour y mener une enquête qui s'annonce compliquée, dans une région reculée où il est considéré comme un étranger. Il s'obstine, malgré les fantômes de son passé, malgré la menace de ses créanciers, et fait surgir des secrets enfouis dans la mine désaffectée qui jadis animait la ville. Il règne dans ce roman une ambiance crépusculaire où les morts ne le sont pas tout à fait et reviennent hanter ceux qui osent les déranger. A mi-chemin entre le fantastique et le thriller, ce roman se dévore avec grand plaisir.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Angleterre / revenants /

Posté le 21/08/2019 à 18:10

L'enfant aux cailloux, Sophie Loubière. Fleuve noir, 04/2011. 330 p. 17,50 € ***

         Elsa Préau, institutrice retraitée vit seule dans un pavillon de banlieue. Un peu désœuvrée, elle observe ses voisins, un jeune couple avec deux jeunes enfants, et un troisième qui détonne : maigre, sale, introverti, il n'apparait que le dimanche dans le jardin où il joue avec des brindilles et des cailloux sans se mêler aux jeux de ses frères et sœurs. Pensant à de la maltraitance, elle tente d'alerter les services sociaux, qui répondent en prétendant que l'enfant n'existe pas. Est-il le fruit de l'imagination de la vieille dame, qui verrait en lui son petit-fils qui a disparu ?

         C'est en tout cas l'hypothèse que soutient son fils, qui met sur le compte de l'arrêt de son traitement les bouffées délirantes de sa mère, laquelle prétend subir un harcèlement téléphonique de son voisin et a truffé sa maison de pièges à souris. Tout porte bien évidemment à croire que la vieille femme affabule, et Sophie Loubière entretient savamment le doute chez le lecteur. C'est la force de ce roman, construit autour du personnage d'Elsa qui malgré ses obsessions est pleine d'humour et d'intelligence. Dommage qu'on y trouve des fautes d'orthographe difficilement admissibles : la "fausse septique", "je me suis permise", "le décès de ta mère m'a attristé" (c'est une femme qui parle), ou encore "traduit" à la place de "traduisit" dans un récit écrit au passé. Et pourquoi cette insistance sur le café, dont elle précise s'il est pris avec ou sans sucre, ou touillé à l'aide d'une petite cuillère ? Ce sont des détails certes, mais j'avoue qu'ils m'ont un peu gâché le plaisir de la lecture, et poussée à ne mettre que trois étoiles à ce thriller psychologique par ailleurs plutôt bien ficelé.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

folie / famille / maltraitance

Posté le 21/08/2019 à 18:09

Territoires, Olivier Norek. Pocket, 06/2016 (Thriller). 374 p. ****

         Malceny, dans le neuf-trois. Trois caïds de la drogue sont exécutés, à quelques jours d'intervalle. Quelqu'un d'autre veut prendre sa place. La brigade du capitaine Coste est chargée de l'enquête, alors que les émeutes se multiplient dans une ville gouvernée par une maire ambitieuse qui ne craint pas de s'entourer de malfrats, tant que cela lui permet de briguer un troisième mandat.

         Olivier Norek est lieutenant de police dans le même département. Alors forcément, son récit n'est rien de moins que vraisemblable : les descentes de police dans des quartiers dits "sensibles" qui finissent par des caillassages en règle, l'escalade de la violence, la précarité sociale qui pousse des retraités à faire les "nourrices" ou des gamins de 12 ans à devenir de véritables tueurs, il n'ignore rien de cette réalité tristement mise en avant ponctuellement par les médias. La solution se fait souvent à coups de subventions de l'Etat que des élus peu scrupuleux détournent à des fins électoralistes : c'est aussi cet aspect, au-delà du travail de terrain de la police, que raconte Olivier Norek dans un roman noir qu'on lit d'une traite, effaré, alors que confortablement assis dans son fauteuil préféré on se dit qu'on a bien de la chance de n'avoir pas grandi dans la cité des Cosmonautes.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

drogue / pouvoir /

Posté le 09/08/2019 à 10:21

Derniers mètres jusqu'au cimetière, Antti Tuomainen / trad. du finnois. Fleuve, 02/2019. 313 p. 19,90 € ****

         Jaakko et son épouse Taina ont mené une entreprise qui vend des champignons des pins, qui prolifèrent dans cette région de Finlande, et qui plaisent tellement aux Japonais qu'ils ont été rebaptisés matsutake. L'affaire est florissante, mais Jaakko apprend qu'il est victime d'un empoisonnement et qu'il ne lui reste que quelques jours à vivre.  Alors qu'il s'apprête à partager cette terrible nouvelle avec sa femme, il la surprend en plein ébat avec un de leurs employés. Il va alors mener l'enquête pour découvrir qui cherche à le tuer.

         Comment réagit-on quand tout s'écroule ? Quand on se sent trahi par ses proches ? Jaakko écarte la tentation du renoncement pour se battre, malgré les symptômes qui l'affaiblissent. S'ensuit un récit assez rocambolesque où il traque tout à la fois sa femme, ses employés, et des clients japonais. C'est à la fois tragique et drôle, et bien construit.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Finlande / adultère / poison /

Posté le 09/08/2019 à 10:16

Il était une fois mon meurtre, Emily Koch / trad. de l'anglais. Calmann Levy, 05/2019 (Noir). 426 p. 21,90 € ***

Alex a fait une chute en escalade. Depuis, il est dans le coma, victime d'un locked-in syndrom. Il entend tout ce qui se passe autour de lui, notamment les conversations entre Bea, sa petite amie, sa sœur et son père. Il découvre alors que sa chute n'était pas accidentelle, et que Bea est à son tour menacée. Mais il ne peut évidemment rien faire, d'autant plus que l'équipe médicale le pense en état végétatif, et qu'on envisage de le débrancher.

Alex est complètement impuissant, mais son cerveau fonctionne très bien. Aussi fait-il de nombreuses hypothèses, et mène une enquête qu'il ne peut partager. Tout l'enjeu consiste à ce qu'autour de lui, les autres fassent les mêmes suppositions que lui. Ce qui va être le cas, même si c'est beaucoup trop lent pour lui, dont le scanner continue de montrer une absence complète d'activité cérébrale. Alex est un protagoniste entièrement passif, l'enquête se déroule malgré lui jusqu'à un dénouement qui m'a paru quelque peu tiré par les cheveux et peu crédible. 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

escalade / coma /

Posté le 09/08/2019 à 10:16

Octobre, Soren Sveistrup / trad. du danois. Albin Michel, 03/2019. 633 p. 22,90 € *****

         A Copenhague, on découvre le cadavre d'une femme amputée d'une main. Quelques jours plus tard, une autre victime est trouvée, les deux mains coupées. A chaque fois, à côté du corps se trouve un petit bonhomme fabriqué avec des marrons et des allumettes. Une signature de l'assassin d'autant plus importante qu'elle porte les empreintes de Rosa Hartung, la fille de la ministre des affaires sociales, qui a disparu un an plus tôt. Naia Thulin, secondée par un inspecteur en situation délicate, suit cette piste qui ne convainc pas sa hiérarchie, laquelle refuse de faire le lien entre les deux affaires.

         Ce drôle de tandem, incarné par une jeune femme qui peine à se plier à toutes les conventions et un policier en disgrâce aux abords antipathique va, à force d'obstination, triompher des multiples fausses pistes et pseudos révélations des deux affaires. Un bon thriller dans l'ambiance automnale de l'Europe du Nord.

Catégorie : Policiers / Thrillers

enlèvement / Danemark / vengeance

Posté le 09/08/2019 à 10:12

Cataractes, Sonja Delzongle. Denoël, 04/2019 (Sueurs froides). 391 p. 20,90 €. ****

         Jan Kostadinovic a perdu toute sa famille lors d'un glissement de terrain qui a englouti le village de Zavoï, dans les Balkans. Trente ans plus tard, il est devenu hydrogéologue et vit à Dubaï avec sa femme et sa fille. Il est resté traumatisé par la catastrophe et n'a jamais remis les pieds dans sa région d'origine, jusqu'au jour où son ami Vladimir Krstic, directeur de la centrale hydraulique construite sur l'emplacement de l'ancien village, l'appelle à l'aide : la centrale révèle des failles et l'ingénieur craint que le terrain instable ne la détruise. Jan doit donc se rendre sur les lieux pour explorer les sources en profondeur, accompagnée de Marija Pavlovic, une journaliste amie de Vladimir qui s'intéresse au phénomène. Mais leur exploration leur fait faire des rencontres inattendues et dangereuses, tandis qu'à la centrale, des meurtres se produisent…

         Un bon thriller, un vrai, dans lequel Sonja Delzongle manie le suspense avec un art consommé. D'origine slave elle-même, elle a donné à son roman une dimension historique, celle de l'héritage douloureux de la guerre fratricide de l'ex Yougoslavie à laquelle bon nombre des personnages ont pris part, Serbes ou Croates. Les blessures ne sont pas encore cicatrisées. A ces stigmates s'ajoutent les légendes locales, celle de la source de Babin Zub et de son gardien, et celle du village fantôme qui surgit des brumes du lac, les soirs de pleine lune. Le climat, dans le printemps tardif des Balkans, est angoissant à souhait, d'autant plus que l'auteur, comme dans son précédent opus Boréal, n'épargne rien à son protagoniste, qui doit tout à la fois lutter contre le traumatisme de son enfance, les croyances populaires dont il est malgré lui imprégné, des adversaires inattendus et redoutables, d'innombrables accidents, chutes et blessures sont il ressort quasiment indemne. Un bémol cependant pour les dernières pages, qui viennent clore de façon dramatique un récit qui n'en avait pas besoin.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Croatie / Serbie / barrage / guerre / folie / légendes /

Posté le 15/07/2019 à 16:59

Surface, Olivier Norek. Michel Lafon, 04/2019. 419 p. 19,95 €. ****

         Noémie Chastain, lieutenant de police, est très grièvement blessée au visage lors d'une intervention de police. Elle en garde des séquelles physiques – elle est défigurée – et psychologiques – elle est devenue incapable de tenir une arme. Ses supérieurs l'envoient à Décazeville, dans l'Aveyron, pour évaluer l'intérêt de maintenir une équipe de police dans une région sans histoire. D'abord meurtrie et en colère à cause de ce qu'elle prend pour une sanction, elle se résigne à passer quelques semaines fort monotones, jusqu'à ce qu'on découvre le corps d'un enfant dans un fût en plastique dans le lac artificiel qui a noyé tout un village, vingt-cinq ans plus tôt…

         Olivier Norek est policier, cela se sent dès les premières pages du roman. Tout y est raconté de façon plausible et vraisemblable. S'il n'évite pas certains clichés et que la psychologie des personnages est parfois un peu simpliste, le récit est bien construit et le suspense savamment dosé.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

campagne / secret / barrage /

Posté le 15/07/2019 à 16:58

Ce que savait la nuit, Arnaldur Indridasson. Métailié, 02/2019 (Noir). 285 p. 21 € **

Un groupe de touristes allemands découvre le cadavre d’un homme pris dans les glaces du Langjökull, en Islande. Il s’agit d’un homme porté disparu il y a trente ans. Konrad, policier en retraite, décide de consacrer son temps à ouvrir l’enquête. Il se rend au chevet du présumé coupable de l’époque, qui continue à nier, et meurt sans jamais avoir avoué. Konrad dispose de très peu d’éléments pour faire la lumière sur ce meurtre, et l’enquête s’avère très fastidieuse, jusqu'au jour où un accident de la route le met sur une nouvelle piste...,

Une enquête fastidieuse pour Konrad, mais aussi pour le lecteur. Ce qui fait d’ailleurs l’intérêt de ce roman au rythme lent et erratique, c’est bien moins les recherches de Konrad que le personnage lui-même, dont le père violent et roublard est mort assassiné, qui souffre d’insomnie et ne se remet pas du décès de sa femme.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

meurtre / vengeance /

 

Posté le 15/07/2019 à 16:51

Chacun sa vérité, Sara Lövestam / trad. du suédois. Pocket, 01/2018. 300 p. 6,95 € ***

         Kouplan est iranien. Sans papiers, il vit dans l'angoisse constante d'être repéré par la police et reconduit dans son pays. Pour gagner sa croûte il s'est improvisé détective privé. Pour sa première enquête il est chargé de retrouver une petite fille, Julia, dont Pernilla sa mère refuse de signaler la disparition à la police, craignant que les services sociaux ne la lui confisquent, au point qu'elle n'a jamais déclaré sa naissance. Kouplan mène une enquête qui n'en est pas une : il interroge les passants, les vendeurs du quartier où Julia était avec sa mère au moment de sa disparition, se rend au cyber café pour faire des recherches sur Internet. Il reconnaît ne pas trop savoir comment s'y prendre, et s'interroge davantage sur la personnalité de la mère, relevant dans ses propos des contradictions qui, petit à petit, sèment le doute dans son esprit : Julia existe-t-elle vraiment ?

Le roman s'achève sur un double dénouement : le premier est logique, sans surprise, mais a le mérite de clore l'enquête de Kouplan. Dans les toutes dernières pages s'ajoute un deuxième élément, parfaitement inutile sauf à considérer que le roman est le début d'une trilogie consacrée à ce drôle de détective à travers lequel on découvre la vie d'un sans papier à Stockholm.

 

Catégorie : Romans policiers / thrillers

Suède / disparition / psychologie / migrants

Posté le 18/04/2019 à 10:31

En attendant la neige, Catherine Desrousseaux. Calmann Lévy, 01/2019. 287 p. 17,90 € ****

Véra était au volant de sa voiture avec mère et sa sœur quand elle a eu un accident. Si sa sœur Mathilde n'a eu que quelques blessures superficielles, sa mère est morte et elle a passé plusieurs jours dans le coma et souffre de nombreuses séquelles psychologiques. Elle fuit Mathilde qui la surprotège et se réfugie dans les montagnes du Haut Jura, dans le chalet d'un ami, espérant grâce à la solitude se sevrer de ses médicaments et recouvrer la mémoire. Elle fait la connaissance de son voisin, un homme mystérieux et distant, et doit affronter l'hostilité des habitants du village.

         La neige n'arrive pas à la fin mais assez vite à l'arrivée de Véra dans le chalet. Ce ne sont d'abord que des papillons blancs, mais bientôt elle va tomber dru et avoir de lourdes conséquences sur la vie de la jeune femme : elle l'isole, la force à un huis clos avec son étrange voisin, l'empêche de quitter le chalet. Véra n'attend pas la neige mais qu'elle s'arrête de tomber. L'inquiétude monte, des signes macabres lui sont envoyés, et voilà qu'elle est attirée par son voisin, qui ne semble pas nourrir les mêmes sentiments qu'elle.

         Un bon thriller montagnard, plaisant à lire, si l'on excepte le problème, récurrent chez nombre d'auteurs contemporains et qui m'agace sérieusement, de l'emploi des temps du passé. Au risque de passer pour un parangon du conservatisme littéraire, je dis et je me répète : non, on ne met pas dans la même phrase le passé-simple et le passé-composé, qui ont la même valeur, mais pas le même niveau de langue, le premier appartenant au registre soutenu, le deuxième à la langue orale. On peut trouver le premier trop emprunté, obsolète et artificiel ; dans ce cas  on ne l'utilise pas, tout simplement.

 

Catégorie : Romans policiers / thrillers

Jura / hiver / famille /

Posté le 18/04/2019 à 10:30

Qui a tué l'homme-homard, J.M. Erre. Buchet-Chastel, 01/2019. 355 p. 19,00 € *****

A Margoujols, un petit village reculé de Lozère, on retrouve le cadavre affreusement mutilé de Joseph Zimm, surnommé l'homme-homard en raison de la difformité de ses mains. Il faisait partie d'un cirque de monstres, arrivé à la fin de la guerre, qui s'est établi là après la mort de son directeur. L'adjudant Pascalini est envoyé sur place pour découvrir le meurtrier, et trouve une aide inattendue en la personne de la narratrice Julie, qui malgré sa tétraplégie s'avère une enquêteuse hors pair et projette de faire de l'enquête un polar bien ficelé. Très vite, les soupçons tombent sur l'auteur d'un blog intitulé "Je vois la vie en monstre", tandis que les habitants nourris aux séries policières se mêlent du travail de Pascalini...

Jubilatoire. C'est l'adjectif qui résume le mieux ce livre aussi drôle sur le fonds que sur la forme. Sur le fonds, il y a les villageois hyperconnectés de ce village perdu, qui doivent leur 4G au handicap de Julie, équipée d'un fauteuil roulant électrique tout terrain et dernier cri, 6 poneys sous le capot, ce qui lui permet de dépasser les 10 kilomètres heure en obligeant son interlocuteur à courir à ses côtés. Précisons que Julie bave (beaucoup), et n'a pour seul moyen de communication que son ordinateur qu'elle manie avec la seule partie de son anatomie valide, à savoir son majeur. Ajoutons à cela une enquête rocambolesque, des freaks vieillissants qui ont fait des enfants dans le village, un adjudant complètement dépassé par les événements et un adjoint qui porte le nom ridicule de Babiloune, ce qui ne l'empêche pas de devenir l'ami de Julie. Sur la forme, J.M. Erre s'amuse, dénonce les poncifs et autres clichés littéraires à travers la plume de sa narratrice qui, en rédigeant son polar, s'interroge sur la façon dont elle pourra suivre les conventions du genre sans sombrer dans les lieux communs. Au point même de nous donner la recette du bon polar qui "compte pléthore d'amateurs exigeants répartis en chapelles aux attentes contradictoires et prêts à en découdre à la moindre alerte."

De quoi apprendre en s'amusant, et lors de ses prochaines lectures policières, trier le bon grain de l'ivraie.

 

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

Lozère / handicap / monstre /


Posté le 27/03/2019 à 10:01

L'Unité Alphabet, Jusse Adler Olsen / trad. du danois. Albin Michel, 09/2018. 628 p. 22 €

         L'avion de Bryan et James, deux pilotes de la RAF, est abattu au sud de l'Allemagne alors qu'ils tentaient de cartographier la région. Ils trouvent refuge dans un train qui convoie des blessés allemands, pour l'essentiel des officiers SS traumatisés, qu'on va installer dans un hôpital psychiatrique appelé L'Unité Alphabet. Les deux Anglais endossent l'identité de deux officiers, et vont passer là de longs mois au cours desquels ils sont soumis, comme d'autres, à de terribles expériences. Bryan réussit à s'enfuir en laissant son ami aux mains des tortionnaires. Trente ans plus tard, Bryan, devenu médecin consultant, se rend à Munich lors des JO de 1972, et se met en tête de découvrir ce qui a pu advenir de James.

         La première partie du roman, basée sur des faits réels, fait la part belle à la sauvagerie nazie qui n'hésite pas à soumettre ses plus hauts gradés à des traitements barbares, entre électrochocs et conditions de détention épouvantables. Pour autant, il y a, parmi les patients atteints de diverses pathologies mentales, aggravées par les expérimentations, d'autres simulateurs que nos deux Anglais. D'historique, le roman semble glisser vers l'espionnage, et revient au genre du thriller lorsque Bryan entreprend sa quête désespérée, qui va lui faire retrouver quelques-uns des patients de l'Unité Alphabet. Le mélange est habile, et si l'on pourrait reprocher au roman une première partie un peu longue, celle-ci prend tout son sens lorsque Bryan remue le passé. L'action se précipite ensuite, durant les quelques jours de l'enquête, et emporte le lecteur.

Catégorie : Romans policiers / Thrillers

guerre / nazisme / amitié /

Posté le 23/02/2019 à 16:12

La ville des morts, Sara Gran / Trad. de l'anglais. Le Masque, 01/2015. 326 p. 20 €

Claire Dewitt est détective privée. Son travail l'amène à La Nouvelle-Orléans, profondément meurtrie par l'ouragan Katrina, où elle est chargée de retrouver l'assassin du procureur Vic Willing.

Disciple de Constance Darling, assassinée quelques années plus tôt, et inspirée par Détection, l'ouvrage du privé français Jacques Silette, Claire Dewitt est un curieux personnage, profondément anticonformiste ; couverte de tatouages, solitaire, elle mène ses enquêtes en consommant force alcool et drogues diverses. Son intuition et une certaine désinvolture lui permettent de se sortir de toutes les situations ; pour le reste, des indices, rien que des indices, suivant l'un des conseils de Silette. C'est un personnage dont la quête personnelle est sans douteplus importante que l'enquête elle-même. Elle paraît presque invincible ; on se demande comment elle va parvenir au terme de son enquête, dont elle dit elle-même que c'est lorsque son employeur menace de mettre fin à son contrat qu'elle est proche du dénouement. Et pourtant, à force d'errements, de cuites et de pétards améliorés, elle parvient à ses fins.

A la fois roman policier, roman de mœurs, récit sociologique, ce récit nous fait découvrir la population de La Nouvelle Orléans, fortement marquée par l'ouragan, dont une partie vit dans des logements insalubres ; on y rencontre des personnages perdus, que la consommation de drogues et d'alcool ne parvient pas à distraire de leur misère financière, sociale, et culturelle. Mais c'est en se perdant qu'on devient un bon privé, se dit Claire Dewitt, dont les errements ressemblent parfois à ceux des Néo orléanais.  

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Etast-Unis /

Posté le 18/01/2019 à 14:23

Helena, Jérémy Fel. Rivages, 08/2018. 732 p. 23 € ****

         Kansas, un été caniculaire. Hayley, 16 ans, s'apprête à participer à un tournoi de golf, et tombe en panne en pleine campagne. Norma, une mère de famille préoccupée par la prochaine participation de sa fille de 8 ans à un concours de mini-miss, lui propose de l'héberger en attendant que le garagiste ait pu réparer la voiture. Hayley passe donc la nuit chez Norma, où elle fait la connaissance de Tommy, le benjamin de Norma, un adolescent renfermé et tourmenteur d'animaux. Son court séjour va rapidement tourner au cauchemar...

         Roman polyphonique où ces trois personnages, tous des monstres à leur façon, se trouvent réunis par ce qu'ils partagent, une furieuse envie de vivre. Tous trois cabossés par la vie, ils sont à la fois victime et bourreau - Norma fait preuve d'une cruauté extrême, Hayley d'une sauvagerie sans pareille, sans parler du jeune Tommy qui jouit sur des cadavres. La panne de voiture vire très vite au cauchemar et entraîne le lecteur dans une succession de rebondissements dont on se demande comment l'auteur va leur trouver un dénouement. C'est noir, violent physiquement et psychologiquement ; les seuls traits de lumière sont incarnés par Graham, le fils aîné de Norma, et par la petite fille, victime collatérale de la folie des trois personnages principaux.


 
Catégorie : Policiers / thrillers

Posté le 18/01/2019 à 14:12

Torrents, Christian Carayon. Fleuve Noir, 08/2018. 332 p. 19,90 € ****

         1984, Fontmile, une petite ville tranquille des Pyrénées. On découvre des morceaux de corps humain dans la rivière, soigneusement découpés. Les victimes sont assez vite identifiées : il s'agit de deux femmes portées disparues depuis plusieurs années, dont l'une, Emilie, était la petite amie de François Neyrat. Les soupçons se portent sur son père, chirurgien à la retraite, qui possède les compétences pour démembrer un cadavre. C'est sa fille aînée qui l'a dénoncé. François, qui refuse de croire son père coupable, et ne comprend pas le geste de sa sœur, entreprend des recherches qui lui font remonter le cours de l'histoire et reconstituer le passé de son père...

         A travers son enquête, François apprend à connaître un peu mieux son père, un personnage distant et taiseux, pour lequel il nourrit une affection qui n'ose s'exprimer. Et puis, il y a Marie, la sœur aînée, avec laquelle François et Valentine, sa sœur cadette, sont brouillés. Marie qui dénonce son père en l'accusant d'actes incestueux, Marie qui semble avoir une revanche à prendre. Pour injuste que François trouve ces accusations, il n'en est pas moins ébranlé : le doute instille en lui un véritable malaise, et c'est là sa motivation principale à découvrir la vérité. Il s'agit d'innocenter son père, certes, mais aussi de donner tort à Marie, celle par qui le scandale est arrivé. Le récit s'ouvre sur la convocation de François à la gendarmerie, appelé à témoigner alors que son père vient d'être arrêté, et enchaîne sur des souvenirs qui viennent éclairer son enquête ; s'ajoutent les propos de Camus, un ami de la famille et ancien policier, qui tâche d'aider François et Valentine tout en préservant le secret du père. La chronologie est un peu complexe, l'intrigue aussi, riche en fausses pistes, oscillant entre le présent et la période noire de l'Épuration, mais elle est portée par le fil conducteur des doutes de François, des non-dits familiaux et des mensonges, jusqu'à un dénouement haletant.

 

 
Catégorie : Policiers / thriller
famille / secret / guerre /

Posté le 18/01/2019 à 14:11

Le cri, Nicolas Beuglet. Pocket, 01/2018 (Thriller). 556 p. 8,30 €                          ***

Environs d'Oslo, hôpital psychiatrique de Gaustad. Le patient 488, surnommé ainsi à cause des chiffres qu'il porte gravés sur la chair de son front, s'est suicidé. Il a la bouche grande ouverte, figée sur un cri d'épouvante, dans la même attitude que l'homme du tableau de Munsch. L'inspectrice Sarah Geringën, en pleine séparation avec son conjoint, doute de la thèse du suicide, d'autant que le verdict du légiste est que l'homme est littéralement mort de peur. Commence alors une enquête qui la conduit en France où elle rencontre un journaliste, frère d'un scientifique impliqué dans des expériences médicales et mort accidentellement. Sarah et le journaliste découvrent l'implication de la CIA dans ces expériences et doivent mener à bien leur enquête alors que le fils adoptif du journaliste a été enlevé et qu'on menace de le torturer s'ils ne parviennent pas à découvrir la vérité...

Un thriller haletant qui combine tous les éléments du genre : une enquête pleine de rebondissements, des révélations successives, deux enquêteurs courageux mais non dénués de failles, une tension croissante avec la captivité du petit garçon qui risque de subir les pires sévices si les deux héros ne parviennent pas à découvrir la vérité sur ces expérimentations scientifiques inhumaines, et le début d'une intrigue amoureuse un peu attendue – Sarah, en mal d'enfant, ne peut qu'être attirée par ce journaliste plein de tendresse pour son neveu qu'il a adopté. C'est cousu de fil blanc, certes, mais le récit remplit son contrat et, cerise sur le gâteau, tout finit bien, sauf pour les méchants.


 

Catégorie : Policiers / thrillers

Suède / médecine /

Posté le 18/01/2019 à 14:05

Posté le 30/10/2018 à 16:38

Dans le silence enterré, Tove Asterdal / Trad. du suédois. Le Rouergue, 10/2015 (Noir). 408 p. 23 €

         Appelée au chevet de sa mère démente, Katrine Hedstrand, journaliste suédoise établie à Londres, découvre l'existence d'une maison familiale située tout près de la frontière finlandaise, à Kivikangas. La maison est en vente, un acheteur s'est manifesté qui en propose un prix démesuré. Katrine se rend sur place et s'installe dans la maison délabrée de sa grand-mère. Elle se lie avec les habitants, sous le choc depuis l'assassinat d'Erik Svandberg, le voisin, qui aurait pu lui parler de cette grand-mère qu'elle n'a pas connue.

         Le récit se passe dans les conditions qu'on imagine - milieu rural et fermé, froid extrême, neige – et fait revivre les années 30 et la montée du communisme dans cette région septentrionale pas loin de la Russie. Lucie découvre un pan de l'histoire familiale qu'elle ignorait, tandis que, en Russie, des mafieux règlent leurs comptes. Ca fait beaucoup, même si, évidemment, tout est lié. Le roman se lit avec plaisir, mais laisse une impression de confusion et d'inachevé.

 

 
Catégorie : Policiers / thrillers
Suède / histoire /

Posté le 12/09/2018 à 13:29

La piste noire, Asa Larsson / trad. Du suédois. Le Livre de Poche, 09/2015. 506 p. 7,90 €

         Une femme est retrouvée mort dans une "arche", une cabane montée sur des patins sur un lac gelé à proximité de Kiruna. Il s'agit d'Inna Wattrang, porte-parole de Mauris Kallis, riche entrepreneur à la tête d'une entreprise minière. Anna-Maria Bella et Sven-Erik Stalnacke découvrent sous la glace un imperméable portant une tache de sang, mais les indices sont maigres. Ils s'interrogent sur le rôle de la victime au sein de l'entreprise Kallis Mining, et finissent par faire appel aux compétences de Rebecka qui se documente sur Kallis et sa société...

Troisième tome des aventures de la procureure Rebecka Martinsson, moins réussi que les deux précédents. Au nord de la Suède, en mars, le printemps n'est pas encore là, le froid et la neige persistent, ce qui permet aux deux enquêteurs, lorsqu'ils retrouvent l'imperméable du tueur inadapté aux conditions climatiques, d'orienter leurs recherches vers une action venue de l'Europe tempérée. Mais la piste est une impasse, l'assassin a agi sous nom d'emprunt. L'enquête est en réalité menée par Rebecka, et se cantonne essentiellement à son expertise du fonctionnement de l'entreprise Kallis Mining. Ses investigations sont entrecoupées de flash-back qui mettent en scène l'entrepreneur, Inna et son frère Didi, faisant apparaître une relation trouble entre ces trois personnages, dont le trio est mené de toute évidence par Mauri, qui se révèle pervers et machiavélique. Le procédé semble un peu artificiel, puisque les enquêteurs ne peuvent avoir accès à ces informations ; le dénouement va s'accélérant et si le lecteur en maîtrise tenants et aboutissants, on se demande bien comment Anna-Maria et Sven-Erik vont bien pouvoir démêler l'écheveau.

Comme dans les précédents opus, on retrouve le goût de l'auteur pour les animaux : Sven-Erik, inconsolable depuis la perte de son chat, adopte un chaton, le chien de Sivving, le grand-oncle de Rebecka, est toujours aussi affectueux, mais leur présence est moins ostensible. Quant à notre héroïne, le roman pour une fois s'achève sans dommages pour elle, qui évite de se faire casser la figure et tombe amoureuse du directeur de son ancien cabinet d'avocats.


 

Catégorie : Policiers / thrillers

Suède /

Posté le 19/04/2018 à 12:54

Le sang versé, Asa Larsson / trad. du suédois. Le livre de Poche, 09/2015. 491 p. 7,60 €

         Deuxième tome des aventures de la procureure Rebecka Martinsson. Dans les environs de Kiruna, dans les régions de l'extrême nord de la Suède, une pasteure est assassinée, son corps retrouvé pendu par une chaîne à l'orgue de l'église. Rebecka, qui se remet tout juste de ses précédentes mésaventures au cours desquels elle a tué deux hommes, se rend sur place pour son cabinet d'avocats. C'est sa ville natale : elle y retrouve des souvenirs, et un peu de paix. Elle se lie avec certains des habitants du coin, et se retrouve malgré elle mêlée à l'enquête sur la mort de la pasteure, Mildred Nilsson, qui par son féminisme s'était attiré l'inimitié de certains parmi ses ouailles...

         Ambiance grand Nord, en été, les nuits qui n'en sont pas, les moustiques, et surtout la nature et les animaux, auxquels l'auteur voue une affection évidente. Il y a les quatre chiens de Lisa, qui la contraignent à laisser son lit pour dormir sur le canapé ; le chat de Sven-Erik qui a disparu, déclenchant chez son maître un chagrin irrépressible ; la louve solitaire que la fondation créée par Mildred protège du fusil des habitants. Hommes et bêtes composent avec la nature, qui ne fait jamais oublier, même au cœur de l'été, sa nature septentrionale ; Rebecka retrouve dans cette région ses souvenirs d'enfance et un lieu où se retrouver : à son arrivée, elle va passer la nuit dans la forêt, allongée entre les troncs, comme s'il lui fallait ce sas pour pouvoir retourner vivre auprès des hommes.

         Elle ne mène nulle enquête, ce sont les policiers qui s'en chargent. Cependant elle contribue malgré elle à découvre le meurtrier, au péril de sa vie. On peut se demander quel plaisir trouve Asa Larsson à malmener ainsi son héroïne, dont on se demande, à la fin du livre, comment elle s'en remettra. La suite au prochain épisode…


 
Catégorie : Policiers / thrillers
Suède /

Posté le 04/04/2018 à 14:18

L'essence du mal, Luca d'Andrea. Denoël, 12/2017 (Sueurs froides). 463 p. 21,90 €

         Jeremiah Salinger, documentariste américain, décide de s'installer dans le village de Siebendoch, dans le Sud Tyrol, d'où sa femme est originaire. Il tourne un reportage sur la brigade de secours en haute montagne avec son coéquipier cameraman. Victime d'une avalanche qui tue l'équipe de l'hélicoptère, il frôle la mort de près et croit sentir une force meurtrière issue de la montagne. Il décide de se reposer et de se consacrer à sa famille, mais découvre un épouvantable massacre survenu 30 ans plus tôt, dans la montagne du Bletterbach, lors d'une tempête d'une rare violence, durant laquelle trois jeunes gens ont trouvé une mort atroce. L'enquête bâclée a classé l'affaire. Sa curiosité est attisée : il se lance alors dans une enquête qui le conduit à interroger son beau-père, et les habitants du village, lesquels voient d'un très mauvais œil un étranger mettre le nez dans leurs affaires, refusent de parler et finissent par s'en prendre à lui…

         Si l'histoire se passe bien en haute montagne, avec sa cohorte de températures négatives et de neige, l'intrigue se cantonne au vase clos du village et de ses environs. Il en résulte une impression d'enfermement et d'angoisse, à l'image de ce que vit Salinger, qui se heurte à la réaction d'une communauté soudée tout autant par les conditions de vie rudes de la région que par le poids du secret. En filigrane, il y a l'omniprésence de cette force obscure que Salinger appelle la Bête, et qu'il a sentie lors de son accident, qui vient parfois hanter son esprit et lui murmurer à l'oreille. Cependant, certains villageois vont finir par parler : à force d'obstination, et au prix de menacer son couple, Salinger parvient à lever le voile sur ce secret, non sans hypothèses plausibles mises à mal par de nouvelles révélations.

         Le roman nous plonge également au cœur de cette communauté bilingue repliée sur elle-même, avec des traditions sauvegardées parfois terrifiantes, comme la Saint Nicolas qui fait intervenir les Krampus, sorte de diables incarnés par les jeunes hommes du village, qui ne se gênent pas pour effrayer la population venue en nombre assister aux réjouissances. Un polar qui allie tension narrative et portrait de moeurs.     

 

Policier lu dans le cadre du Prix littéraire Elle.

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

grands espaces / secret /

Posté le 23/03/2018 à 09:51

L'homme aux boutons de manchettes, Marie Bertrand. Editions Cockritures, 10/2017. 439 p. 15 €

Charles-Edouard Keller, commandant de police à Strasbourg, surnommé Smart en raison de son élégance, doit élucider avec sa brigade le meurtre d'une jeune prostituée roumaine découverte dans une tente, dans le parc de Pourtalès. Pendant que l'enquête suit son cours, il reçoit de la part de sa mère une paire de boutons de manchettes, qui s'avère être l'œuvre du maître verrier Lalique. Intrigué par ces accessoires, il se penche alors sur le passé de sa famille dont il ne sait pas grand-chose, et découvre l'existence de Maria, une arrière-arrière grande tante mystérieusement absente de l'arbre généalogique, comme on si on avait voulu effacer sa trace. Il découvre également que la mort accidentelle de son arrière-arrière grand-père est plus mystérieuse que la légende familiale veut bien le dire. En parallèle, en 1926 à la Petite France, un inconnu poursuit un homme qu'il projette d'assassiner, afin d'assouvir une vengeance…

Malgré l'abus de précisions géographiques dans les parcours urbains de Charles-Edouard, l'histoire tient en haleine. Smart démêle petit à petit l'écheveau en remontant la piste des deux paires de boutons de manchettes, la sienne et celle qu'un antiquaire niçois, passionné par la verrerie, a obtenu d'un riche Américain. Une quête sur des origines familiales et un secret de famille bien conservé. Smart est fort sympathique, avec ses costumes trois pièces et sa Jag, son obstination à trouver pour chaque mot important dix synonymes ; il a des airs d'Adamsberg dans son talent à être hors normes.

Un polar habilement mené, qui nous emmène dans les différents quartiers d'un Strasbourg contemporains et des années 30. Au gré de l'enquête de Smart, on découvre la ville sous différents aspects, géographiques et historiques, on plonge dans l'univers de la verrerie de Meisenthal, et on apprend que les Petit Lu symbolisent le temps. Un bon moment de lecture.

        

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Alsace /

Posté le 14/01/2018 à 18:26

Chacune de ses peurs, Peter Swanson. Trad. de l'anglais. Calmann-Lévy, 09/2017 (Noir). 375 p. 21,90 €

Kate, une jeune Londonienne étudiante en arts, à peine remise d'une violente agression, échange son appartement contre celui de Corbin, son cousin américain à Boston. L'endroit est superbe, le logement immense et luxueux, les six mois prochains s'annoncent bien. Mais une jeune femme, Audrey Marschall, a été assassinée dans un appartement voisin. Aux dires d'un autre locataire, Alan Cherney, elle entretenait une relation régulière avec Corbin, qui prétend à peine la connaître. Pourquoi cachait-il sa liaison ? Et que penser d'Alan Cherney, qui espionnait Audrey avec ses jumelles ?

Le meurtrier ainsi que son mobile sont révélés à la moitié du roman. Le suspense se cantonne donc à trouver sa réelle identité, et à savoir si Kate sera sa prochaine victime. C'est un peu mince… d'autant que la psychologie des personnages est réduite : Kate est définie par ses angoisses et son addiction aux anxiolytiques,  Alan est sans relief, et Corbin passe pour un idiot sous la coupe de son ami, pervers narcissique dont le portrait est vite dressé. Par ailleurs, le récit est truffé de poncifs culturels : au restaurant, on s'enfile des litres de coca ou de bière ; quand on lit un roman le soir sur son canapé, c'est forcément avec un verre de vin rouge…

On cherche vainement en quoi les mésaventures de Kate ont pu mettre à jour chacune de ses peurs : peur d'être surveillée, cauchemars, certes, mais le titre laissait attendre une montée en puissance de l'angoisse qui n'est pas du tout exploitée. Pour résumer, une lecture détente sans grand intérêt, si ce n'est d'être distrayante.

 

Roman lu dans le cadre du Prix des Lectrices de Elle

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Etats-Unis /

Posté le 10/01/2018 à 13:38

Tango fantôme, Tove Alsterdal. Le Rouergue, 10/2017 (Noir). 471 p. 23,50 €

                Un soir de printemps, une femme tombe de son balcon au cinquième étage. La police conclut rapidement à un suicide, mais Helene, sa sœur, est un peu dubitative. En fouillant dans ses affaires, elle découvre que Charlie, avec laquelle elle était brouillée depuis longtemps, menait une sorte d'enquête sur leur mère, disparue en Argentine en 1978, alors qu'elles étaient toutes petites. Helene part alors sur les traces de Charlie et de cette Ing-Marie qu'elle a si peu connue.

                Des femmes en quête. C'est le nœud central du roman. Il y a la quête d'amour et d'absolu d'Ing-Marie, qui va la conduire dans des hôtels sordides de Buenos Aires et se retrouver, bien malgré elle, membre d'un groupe d'opposants à la junte militaire et emprisonnée dans les geôles de l'ESMA. Il y a la quête de la mère chez Camilla-Charlie, hantée par la disparition de celle qui leur a préféré Ramon, au point d'en oublier sa famille et ses deux petites filles. Il y a enfin ce besoin irrépressible qui prend Helene, qui jusque-là menait une vie tranquille dont elle avait exclu tout élément susceptible de perturber son fragile équilibre, de comprendre et, aussi, mettre un visage sur cette mère disparue et probablement morte.

                Et chacune à sa façon la mène à son terme. C'est à la fois le début et la fin de ce roman, qui s'ouvre sur la mort de l'une, et se ferme sur le retrait du monde de l'autre. Entre les deux, le parcours d'Helene, qui va aller au bout d'elle-même, se découvrir, devenir elle-même. En ce sens, on peut s'interroger sur le genre de ce roman, qui répond partiellement aux critères du genre policier – il y a bien un meurtre, et une enquête – mais qui est également un roman d'introspection, et un roman historique. A travers la quête d'Helene, à travers la vie d'Ing-Marie, on découvre une Argentine bien loin des clichés habituels sur la ville du tango ; non, c'est la cité des desaparecidos, des femmes en fichu noir, et l'époque de la méfiance et de la peur, parfaitement incarnée 36 ans plus tard par le personnage de Ramon Maguid.

                J'ai été au début un peu perdue par le foisonnement des personnages, dont on perd certains de vue d'ailleurs ; je continue à m'interroger sur le rôle du voisin aux perroquets, somme toute anodin dans la mort de Charlie, et me demande s'il n'a pas été là surtout pour permettre à Helene de s'écarter un temps de son mari et pour montrer que son couple bat de l'aile. Et puis, on s'habitue aux points de vue qui se dégagent : celui d'Hélène, celui de Chevalier, et les retours en 1978. Un roman dense, long, bien mené, qui échappe aux clichés du genre et s'est avéré une bonne lecture.

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Argentine / initiation /

Posté le 22/12/2017 à 15:46

En sacrifice à Moloch, Asa Larsson. Albin Michel, 09/2017. 444 p. 21,90 €

Dans les forêts de la Laponie suédoise, des chasseurs abattent un ours. Ils découvrent dans le cadavre une main humaine puis, très vite, le reste du corps éparpillé aux alentours. Il s'agit de Frans Uusilato, âgé de 90 ans. On conclut à un accident de chasse et on classe l'affaire, jusqu'à ce que, quelques mois plus tard, Sol-Britt, la fille d'Uusilato, soit assassinée à coups de fourche, tandis que son petit-fils Marcus a disparu. Le chien du procureur Rebecka Martinsson retrouve sa trace mais le petit garçon, choqué, ne peut témoigner. Elle découvre que d'autres membres de la famille ont succombé à une mort violente, et suspecte une vengeance, mais elle est évincée de l'enquête. Aidée par Krister Eriksson, son ami de longue date, elle mène une enquête officieuse...

Rebecka, qui n'a pas apprécié d'être démise de l'enquête au profit de l'antipathique et ambitieux Carl von Post, s'octroie un long congé maladie dont elle va profiter pour démêler les fils de cet écheveau familial, aidée par Krister, son amoureux transi qui tâche d'oublier les cicatrices qui le défigurent. De fausses pistes en rebondissements, elle va découvrir ce que cache cette famille dont l'histoire est née dans une mine d'extraction de minerai au début du 20ème siècle.

Le récit se partage donc entre les tâtonnements de Rebecka, qui par ailleurs tergiverse sur sa relation avec son petit ami, et les parties plus historiques mettant en scène Elina Petterson, institutrice, et Hjalmar Lundbohm, le directeur de la compagnie minière. C'est d'ailleurs cette histoire improbable entre cette jeune fille modeste et ce plénipotentiaire qui captive davantage le lecteur, - lequel en anticipe la fin bien avant la naïve Elina -, bien plus que l'enquête de Rebecka, qui à mon sens s'attache davantage aux galeries de personnages qu'aux faits, ces derniers ne prenant véritablement sens que dans la dernière partie du roman où la narration s'accélère et s'emballe.

A lire essentiellement pour l'ambiance de cet hiver qui arrive tôt dans cette région septentrionale, pour les personnages… et pour les chiens, dont le comportement est justement décrit.

         Roman lu dans le cadre du Prix Littéraire des Lectrices de Elle édition 2018.

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Suède /

Posté le 10/11/2017 à 10:18

Ne fais confiance à personne, Paul Cleave. Sonatine, 08/2007. 458 p. 21 €

         Jerry Grey, célèbre auteur de polars, ne sait plus où il en est. A force d'inventer des meurtres plus ingénieux les uns que les autres, n'aurait-il pas fini par se laisser tenter et passer à l'acte ? D'autant plus que sa vie comporte d'étranges zones d'ombre... Hospitalisé pour un Alzheimer précoce, il ne parvient plus à discerner la réalité des fantasmes : qui est le vrai Jerry Grey ? Un romancier talentueux au cerveau affaibli par la maladie, ou un fou meurtrier, accusé du meurtre de sa femme, qu'il aurait commis dans un état second ? C'est alors que la police commence à soupçonner que les histoires de Jerry ont été inspirées de faits réels...

         La quatrième de couverture annonçait un roman dans la veine du thriller glaçant Shutter Island de Dennis Lehane. Je n'y ai cependant pas retrouvé l'habileté avec laquelle Lehane distillait le doute jusqu'à la dernière phrase. Ici, la maladie, qu'il surnomme le Capitaine A, lui fait oublier ce qu'il fait ; dans ses moments de lucidité, Jerry est lui-même, écrivain ; il agit mal sous la personnalité d'Henry Cutter, son nom de plume. Jerry-Henry est une sorte de personnage à la Dr Kekyll et Mr Hyde. Est-il conscient et responsable de ses actes ? Où est la part de fantasme dans ce qu'il raconte, puisque c'est là son métier, d'inventer, même si, dit-il, on doit s'appuyer sur ce que l'on connait ? Le récit se compose d'extraits de journal où Jerry est tantôt lucide, ou tantôt écrit sous le nom d'Henry, dans une mise en abîme qui touche à la perversité ; d'autres chapitres nous présentent l'écrivain enfermé dans la "maison de repos". Paul Cleave prend plaisir à perdre son lecteur entre ces différentes narrations, ainsi que dans une temporalité qui renonce à la chronologie. Tout cela fonctionne, et c'est plus dans  ces confusions, et dans les ravages que commet la maladie, parfaitement bien décrits, que réside l'intérêt du roman, plutôt que dans un doute levé dans la dernière partie du récit.


 

Catégorie : Policiers / thrillers

Etats-Unis /

Posté le 26/10/2017 à 17:40

Inavouable, Zygmunt Miloszewski. Fleuve Noir, 09/2017. Traduit du polonais. 588 p. 21,90 €

Quatre personnages sont réunis pour former une équipe des plus improbable, chargée par le ministère polonais de retrouver le Portrait de jeune homme de Raphaël, estimé à des millions de dollars, disparu au cours de la Seconde Guerre Mondiale. Leur quête va les mener sur les traces d'une collection complète de tableaux impressionnistes, spoliée par les Allemands, et les conduire aux Etats-Unis, puis dans divers pays d'Europe du Nord, les contraindre à se réfugier dans une cabane délabrée puis dans un zoo, afin de débusquer les toiles et de mettre la main sur un secret qui pourrait bien réécrire l'histoire.   

Un polar dans le monde de la peinture et des trafics en tout genre, qui allie aspect documentaire et intrigue palpitante. Un des moments forts du récit est à mon avis le casse raté de la villa du riche philanthrope, à New Rochelle. De rebondissement en rebondissement, Zofia, Karol, Lisa et Anatol parviennent à la vérité : on peut cependant regretter certaines grosses ficelles (la responsabilité de Zofia) ou l'apparition un peu gratuite de certains personnages que l'on perd de vue sitôt leur rôle d'indicateur achevé (l'écrivain et sa femme dans l'hôtel yougoslave, par exemple).

         A signaler aussi, l'excellente traduction qui permet au lecteur français de goûter l'humour de l'auteur. Par exemple, lorsque Karol Boznanski demande à son passager de "jeter" sa montre de prix dans la boîte à gants : "Mais… c'est une véritable Audemars. Karol lui jeta un coup d'œil éloquent, au point que le vice-président finit par mettre la montre dans la boîte à gants, mais avec tant de simagrées qu'on aurait juré qu'il venait d'enfoncer un œuf de Fabergé dans du fumier."

         Roman lu dans le cadre du Prix Littéraire des Lectrices de Elle 2018.


 
Catégorie : Policiers / thrillers
art / guerre /

Posté le 13/09/2017 à 12:23

Un appartement à Paris, Guillaume Musso. XO, 03/2017. 464 p. 21,90 €

Madeline Greene, ancienne enquêtrice à la police londonienne, vient de quitter ses fonctions pour s'accorder une pause. Elle a loué la maison du peintre Sean Lorentz, décédé l'année précédente, inconsolable après l'assassinat de son petit garçon. Mais la maison a été également louée à Gaspard Coutances, dramaturge, qui compte profiter de son séjour à Paris pour écrire sa nouvelle pièce, très attendue. La rencontre menace de tourner vinaigre, mais les deux jeunes gens se découvrent une passion commune pour Sean Lorentz, dont ils parviennent à trouver trois derniers tableaux. Leur quête les amène à se pencher sur la mort du fils de Lorentz, dont ils sont de plus en plus persuadés qu'il est toujours vivant…

Thriller, page turner, ce récit regorge effectivement de rebondissements. Mais il est également truffé d'invraisemblances (Gaspard, qui n'a pas de téléphone portable, s'achète un smartphone dont il devient un pro en moins de 24 heures, les deux personnages sautent dans un avion comme on prend le métro, faisant fi de toute contrainte horaire ou pécuniaire…), de détails convenus et de culture picturale qu'on étale pour tenter de faire oublier qu'il s'agit d'un roman de gare. Bref, à lire d'un œil à l'heure de la sieste, et à oublier très vite.

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Posté le 11/08/2017 à 18:56

Quand sort la recluse, Fred Vargas. Flammarion, 05/2017. 478 p. 21 €

        Le commissaire Jean-Baptiste Adamsberg a pris le large en Islande. Mais il doit quitter son refuge et rentrer à Paris : une nouvelle enquête sur la mort d'une femme écrasée sous les roues d'un 4X4 l'appelle. L'affaire est résolue en 24 heures, bien qu'Adamsberg soit toujours dans les brumes de son esprit qui s'évade et s'intéresse à la mort de trois octogénaires, dans la région de Nice. Tous piqués par la loxosceles rufescens, l'araignée recluse, dont le venin provoque des nécroses. Mais personne ne croit que la mort de ces trois hommes soit due à un venin d'araignée, dont la quantité est trop faible pour être létale. Personne, sauf le commissaire, dont la curiosité le conduit au muséum d'histoire naturelle, où il fait la connaissance d'Irène Royer-Ramier, une septuagénaire qui va l'aider à mener cette enquête officieuse, laquelle va le conduire d'impasse en impasse…

         Du Vargas grand cru, où l'on retrouve la musique de la langue, les personnages typés de la brigade – les mèches rousses de Veyrenc, très présent dans ce récit, Mordent l'hypersomniaque, Violette Retancourt, Danglard mis au rancard… -, des situations loufoques comme celle où la brigade entière se mobilise pour nourrir une famille de merles qui a élu domicile dans la cour du commissariat.

Et surtout, quelle maestria dans cette enquête pleine de fausses pistes ! Adamsberg suit son chemin à sa manière habituelle, attendant que les bulles de pensées viennent en surface. Il parvient à convaincre certains éléments de la brigade à collaborer et à traquer celui ou celle qui est parvenu à se servir du venin de la recluse comme d'une arme mortelle ; il s'obstine, avec pour lui ses seules intuitions et la confiance de quelques subordonnés. Comme Sherlock Holmes ou Hercule Poirot, c'est lui qui trouve la clé de l'énigme, à force d'obstination parce que, suivant le conseil de Lucio, quand ça démange, il faut gratter, jusqu'au sang.

 

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Posté le 06/07/2017 à 16:40

La fille d'avant, JP Delaney. Mazarine, 03/2017. 428 p. 21,90 €

Jane vient de perdre son bébé. Elle a besoin de se remettre et décide de s'installer dans un logement où elle se sentira bien. Elle découvre le 1, Folgate Street, une maison d'architecte dont le décor minimaliste la séduit instantanément. Mais la signature du bail est soumise à l'approbation de son créateur, Edward Monkford, qui impose à ses locataires une série de règles draconiennes incontournables s'ils veulent rester dans la maison. Jane s'y plie, et découvre l'identité des occupants précédents, Emma et Simon, qui ont vécu ici un moment, jusqu'à leur séparation. Emma est restée, jusqu'à sa mort quelques mois après, d'une chute dans l'escalier. Jane commence à se sentir menacée, d'autant plus qu'elle apprend que la femme et le fils de Monkford sont morts pendant la construction de la maison...

         Les chapitres alternent entre l'histoire de Jane et celle d'Emma. Bien vite, on se rend compte que la première répète, parfois au geste ou à la parole près, ce qu'a fait la précédente. Certains chapitres se répètent, en une sorte de copié-collé où seuls les prénoms changent. L'effet fonctionne, même s'il est un peu grossier : l'auteur embarque le lecteur dans une suspicion grandissante vis-à-vis de Monkford, qui apparaît comme un véritable monstre de perversion, froid et calculateur. Ce choix d'attirer l'attention sur lui minimise le rôle du petit ami, et rend le dénouement peu crédible.

         L'idée de départ était séduisante, mais l'intrigue cousue de fil blanc et les personnages trop caricaturaux, qu'il s'agisse de Monkford ou des deux jeunes filles dont la naïveté confine à la bêtise.

 

Catégorie : Policiers / thrillers

Posté le 31/05/2017 à 09:29

Graham Joyce. Au cœur du silence. Gallimard (Folio), 02/2016. 341 p. 7,70 €

Zoé et Jake fêtent leurs dix ans de mariage dans une petite station pyrénéenne. Ils sont en train de skier quand ils se font surprendre par une avalanche. Zoé se retrouve enterrée sous la neige, et manque d'étouffer, jusqu'à ce que Jake, qui s'est accroché à un arbre, parvienne à la délivrer. Ils retournent au village pour s'apercevoir qu'il a été évacué de tous ses occupants. Leur hôtel est également désert, mais l'électricité fonctionne encore. Ils y passent donc la nuit, et, comme ils ne parviennent à joindre personne, décident alors de quitter le village en empruntant une voiture. Le brouillard les contraint à faire demi-tour. Leur nouvelle tentative le lendemain est elle aussi vouée à l'échec : apparemment, ils ne peuvent s'en aller, et leurs pas les ramènent toujours à leur point de départ...

Ce roman est étonnamment publié chez Gallimard en Folio SF, alors qu'il relève à mon sens davantage du thriller. Un couple se retrouve dans un village abandonné, mais qui jouit de tout le confort de la vie moderne : les magasins et restaurants sont ouverts – même si les cuisiniers ont disparu -, tout est à disposition, et même les télésièges fonctionnent. Le paradis… Évidemment, Zoé et Jake, d'abord un peu gênés, oublient vite leurs scrupules et profitent de leur liberté, quoiqu'un peu timidement. On s'attend à ce que le huis clos devienne pesant, et que le couple se déchire. On pressent la rupture… d'autant plus que les deux jeunes gens ont l'insulte facile – on peine à croire qu'ils soient amoureux à se traiter de "connard" et d'autres mots d'oiseaux – ce qui les rend assez peu sympathiques. Pourtant, l'union tient. Et de nombreux petits détails s'accumulent, qui vont bientôt faire basculer le récit dans un climat d'angoisse où l'auteur distille des indices qui prendront sens au dénouement… même si celui-ci est un peu attendu. Un roman qui tient son lecteur en haleine et remplit donc son contrat.


Catégorie : Policiers / thriller

grands espaces /

Posté le 16/12/2016 à 10:19