Graham Joyce. Comme un conte. Bragelonne (L'Autre), 02/2015. 443 p. 20 €

La campagne anglaise, un soir de Noël. On frappe à la porte de Dell et Mary Martin. Se présente à eux une jeune femme dépenaillée et sale, qu'ils reconnaissent cependant aussitôt : c'est Tara, leur fille, qui n'avait pas seize ans lorsqu'elle a disparu, vingt ans plus tôt. Et la Tara qui se tient devant eux n'a pas pris une ride. Elle prétend dans un premier temps qu'elle a voyagé, puis elle finit par avouer la vérité à son frère Peter : elle a voyagé, certes, mais dans le monde des fées, où elle a passé six mois, jusqu'à ce qu'une "charnière" et la convergence de la lune lui permettre de revenir dans le monde réel. Evidemment, personne ne la croit, ni ses parents qui l'aiment mais la trouvent fort étrange, ni son frère qui l'emmène voir un psy. Seul Richie, son petit ami de l'époque, lui accorde le bénéfice du doute...

Graham Joyce est un romancier anglais spécialisé en littérature américaine. Son récit est mâtiné de ses deux influences : le monde féérique, qui a la part belle dans son récit, et une construction imparable de l'histoire dans laquelle alternent les chapitres à la narration classique à la troisième personne, et d'autres où différents personnages prennent la parole – Peter, le psy, Richie. Ca fonctionne très bien, et tout paraît cohérent. Le lecteur croit d'emblée Tara, en une sorte de pacte tacite passé avec l'auteur, mais l'intelligence de ce dernier réside moins dans le fait qu'on se demande comment diable Tara va réussir à persuader ses proches qu'elle dit la vérité que dans la façon dont un séjour chez les fées a des conséquences sur sa vie d'humain ordinaire. Et c'est la force de Graham Joyce : prendre un fait anormal, et impossible, et faire qu'on y croie.

Ajoutons à cela les personnages secondaires très attachants, comme Richie, l'ancien petit ami de Tara, musicien doué mais raté devenu quasi alcoolique qui joue dans les pubs, ou Jack, le fils de Peter, qui passe la moitié du récit à trouver comment racheter le fait d'avoir tué le chat de la voisine à coups de carabine, et on aura pour le coup un roman divertissant mais aussi dépaysant. Un gros coup de cœur pour ce mois de décembre.


Catégorie : Littérature étrangère

fantastique / Grande Bretagne /

Posté le 15/12/2016 à 17:54