L'Usine à Paroles

Nouvelles

Tango por el mundo

1er épisode


Ils ne s’étaient jamais vus. Mais la première fois où Serge et Natalie s’aperçurent, ils se reconnurent, ce qui ne surprit pas vraiment ceux qui assistèrent à leur rencontre, tant il semblait évident qu'ils finiraient bien un jour par se croiser.


Il est vrai qu’ils se ressemblaient. Mais surtout, en les regardant danser ce soir-là, à cette fête d’anniversaire, on s'étonna moins de les voir s’assembler que du fait ce que ces deux-là mis ensemble devinssent si beaux.


Car, pris séparément, Serge et Natalie ne l’étaient pas. Séduisants certes, mais pas beaux. Pas éblouissants, ni merveilleux.


Elle, elle était très grande, et excessivement mince, à la limite de la maigreur, au point qu'elle cherchait souvent à se cacher en revêtant de grandes chemises d’homme. Pourtant, elle accentuait encore sa haute taille en portant des pantalons sombres et en se perchant sur des bottines à semelles compensées.

D’ailleurs tout, chez elle, paraissait démesuré : ses mains, longues, grandes plus que fines, qui s’agitaient toujours quand elle parlait ; ses yeux, allongés, d’un bleu si foncé qu’il semblait noir, assombris par d’épais sourcils qu’elle se refusait à épiler. Seules la bouche et les dents étaient petites, et lui donnaient un étonnant sourire mutin – qu’elle eût volontiers échangé contre un râtelier de publicité pour dentifrice. Elle se consolait avec ses cheveux châtains, épais et bouclés, qu’elle laissait libres sur ses épaules ou qu’elle attachait avec une grande épingle en bois.


Une certaine timidité et une gentillesse naturelle venaient compenser son allure baroque et, un instant décontenancé par le personnage, on se laissait très vite prendre par sa douceur.


Et puis, elle dansait. Elle acquérait de la sorte la grâce qu’il lui manquait. Salsa, rumba, afro-cubain, bossa-nova, tango – tango surtout -, c’est d’ailleurs comme ça qu’elle avait rencontré Serge.


Elle l’avait vu debout sur le seuil de la porte, surgi tout d’un coup de nulle part. Elle n’avait jamais entendu parler de lui qui semblait connaître tout le monde. Sur le coup, elle détesta ce genre qu’il se donnait, façon retour de l’enfant prodigue, beau parleur, et cependant si grand qu’il se voûtait quand il parlait aux autres.

Maigre lui aussi, il paraissait incapable de maintenir la même position plus d’une minute et, passait sans cesse d’un pied sur l’autre. Une silhouette d’oiseau de proie empêché de voler, accentuée par le nez légèrement busqué. Natalie aurait fini par le trouver franchement ridicule s’il n’avait pas jeté un coup de ses yeux clairs, vifs et mobiles, autour de lui, comme à l’affût, pour s'arrêter sur elle et la dévisager sans même prendre la peine d'être discret.

Surprise, elle lui rendit son regard. Son visage était rendu plus osseux encore par le catogan qui débordait sur le col de sa chemise. A le voir si sec, elle aurait juré qu’il avait la raideur d’un bout de bois, mais il vint vers elle bien vite et, l’ayant saisie à la taille et au bras, sans mot dire, il l’entraîna sur une chanson de Guihermo Portabales.


Quelques minutes pour se caler à deux : avec des hésitations, des à-coups, les mains et le corps crispés, il fallait prendre la mesure des pas de l’autre, son rythme, placer sa jambe dans l’espace disponible, prendre ses marques contre lui. Avec la confusion et les essais malhabiles des débuts, ils se cognaient les genoux, s’excusaient, reprenaient… Et puis, très vite, tout se mit en place. Serge s’était redressé, mais il la dépassait tout juste d’une tête : ils dansaient, ravis de trouver enfin partenaire à leur taille. Ça allait tout seul, les pas s’enchaînaient avec une entente qui faisait anticiper les mouvements de l’autre, avec la sensation de bouger sans effort, et de ne plus vouloir s’arrêter, interrompre cette intimité soudaine.


Ils dansaient donc, et dansèrent longtemps. Au début, on les regarda, disant qu’on était sûr que ces deux-là, ils étaient faits pour s’entendre, et admirant leur technique, leur souplesse inattendue, et puis on finit tout de même par s’étonner de cette connivence.


Eux, du reste, ne s’en souciaient pas. Ils se fatiguaient, mais les cuivres et les percussions, le bandonéon les guidaient, les empêchant de s’en aller, les maintenant dans une sorte de transe. Natalie ne comptait plus les danses, elle sentait son corps s’alourdir et s’amollir, dans la chaleur de la salle. Ses mains sur lui étaient moites, il avait chaud, lui aussi et, se tenant l’un contre l’autre, dans la promiscuité de la danse, ils mêlaient leurs transpirations.


Ils revinrent tout de même s’asseoir avec les autres, étourdis, saoulés de musique, les joues rouges de chaleur et d’enthousiasme. Assis au milieu des convives, ils se tenaient la main, se parlant à l’oreille dans le bruit, souriants, sans pouvoir se détacher, pris déjà l’un par l’autre. C’était si criant que tout le monde le voyait. Une banale histoire de séduction transformait les petits canards : une métamorphose qui touchait presque au miracle.


Serge se montra brillant et causeur, comme à son habitude, se jetant à corps perdu dans la conversation pour les beaux yeux de Natalie, laquelle, oubliant sa réserve coutumière, parlait elle aussi avec animation, sollicitant du regard – déjà ! - une approbation que Serge lui accordait aussitôt.


Ils quittèrent la table à de nombreuses reprises au cours de cette nuit. Comme il arrive souvent, ils donnèrent envie à d’autres de se frotter aux rythmes sud-américains, et la salle fut bientôt envahie de couples évoluant plus ou moins confusément, de plus en plus nombreux. On n’avait plus guère de place pour bouger, on se heurtait, on s’excusait…

Puis le bandonéon de Piazzolla vint offrir un moment de calme bienvenu, qui fit fuir les danseurs, ne laissant que quelques couples qui, serrés l’un contre l’autre, bougeaient à peine. Natalie se risqua à poser sa tête sur l’épaule de Serge, laissant aller sa joue contre la chemise trempée de son compagnon. Il la serrait contre lui, sans oser bouger, tâchant d'ignorer les fourmillements de ses bras, et faisant voler de son souffle des mèches de cheveux sur la nuque de Natalie. Elle était toute proche…

Il lui sembla même qu’elle approchait sa tête encore plus près. Il sentit alors ce petit pincement au cœur, ce bref instant de panique où, chacun de ses sens en alerte, il se demandait encore si cela était bien réel. Mais c’était bon aussi, cette incertitude, ce trouble fragile où il se tenait, avant que tout bascule, si bon qu’il tâcha de le faire durer, jusqu’à n’en plus pouvoir et enfin, se rendre.



Au petit matin, presque tout le monde était parti. Quelqu’un s’était endormi sur place, la tête posée sur ses bras repliés, à table. Eux, ils dansaient encore. 




2ème épisode



Clap clap clap…. De l’eau gouttait dans la tête de Natalie.


Elle tourna sur elle-même, cherchant à replonger dans l’inconscience, à oublier le bruit d’eau, mais en vain. L’oreiller était impuissant à amortir le crépitement de la pluie. Elle se remit sur le dos, soupira, et perçut enfin le son d’une respiration régulière près de son oreille, qui la décida à ouvrir enfin les yeux. A son côté, sur un oreiller bleu, dormait tranquillement son danseur de la veille.

Paisible, une mèche de cheveux barrant le visage que la barbe commençait à ombrer. Elle le regarda un instant, puis s’étira. Elle avait le corps meurtri, la peau froissée. Sa nuque surtout lui faisait mal, sa nuque qui avait abdiqué, fatiguée de se tenir si raide lorsque, le petit matin venant, Serge s’était penché vers elle. Ce souvenir l’émut suffisamment pour achever de l’éveiller tout à fait.

Elle s’assit dans le lit, et constata qu’elle n’avait pas quitté ses vêtements. Elle éprouva alors toute l’incongruité de la situation : une nuit de danse, une soudaine et inexplicable complicité avec un inconnu qu'elle avait adopté avant même de savoir son nom, et suivi pour se retrouver encore toute habillée dans son lit. Elle se rappela alors leur arrivée dans le studio de Serge au petit jour, cet engourdissement qui l’avait saisie, jusqu’à l’abrutir ; elle avait dû s’assoupir sans pouvoir lutter plus longtemps, il l’avait couchée… Soudain, elle se sentit vaguement honteuse : cette agitation, cette façon de se donner en spectacle, et finir comme ça, à s’endormir comme une petite fille ! Tout cela lui ressemblait si peu…


Elle se leva avec beaucoup de précautions, et jeta un coup d’œil au réveil posé à terre à côté du lit. Il n’était que dix heures. Elle bailla, et alla jusqu’à la porte-fenêtre dont elle écarta les rideaux. Au-dehors, tout était noyé dans la brume. Elle laissa retomber le tissu et, décidée maintenant à s’en aller sans réveiller Serge, frissonnant déjà à l’idée d’affronter le mauvais temps, elle commença à chercher ses chaussures. Elle en dénicha une, à demi dissimulée derrière un fauteuil, puis, courbée dans la pénombre, partit en quête de l’autre. Elle farfouilla un instant dans l’appartement, soulevant un vêtement, explorant les recoins susceptibles de cacher l'autre, en vain.


Natalie se tenait là, sa bottine à la main, regardant la porte d’entrée, puis le lit bleu, un peu lasse, partagée entre l'envie de fuir et le besoin de tendresse. Serge bougea dans son sommeil, son bras tâtonnant la place qu’elle avait quittée. Elle lâcha sa chaussure, retira son pantalon, et se glissa dans le lit. Les bras de Serge l’enveloppèrent. Elle se rendormit aussitôt.


Midi. Un bruit de cloches tira Serge du sommeil. Tout contre lui, lui tournant le dos, la tête sur son épaule gauche, dormait Natalie. La retrouver là le fit sourire de contentement. Il était bien, reposé. Il tira doucement son bras engourdi et, s’appuyant sur le coude, voulut la voir. Il écarta les cheveux et regarda longuement son visage, profitant de son abandon pour l’observer à l’envi, tant elle était livrée là toute entière à son regard. Elle semblait si tranquille qu’il eut envie de la toucher.

Du bout du doigt, il effleura la racine des cheveux un peu crépus le long du front, les arcades sourcilières, l’arête du nez, le duvet qui ourlait la lèvre supérieure. A ce léger contact, Natalie manqua de se réveiller. Elle fronça le nez.

La main de Serge s’arrêta un instant, puis plongea dans ses cheveux. Ils étaient étrangement doux et brillants, et Serge aurait continué longtemps si ses doigts n’avaient pas fini par accrocher un nœud. Natalie sursauta et ouvrit tout grand les yeux. Elle ne vit que le visage de Serge penché sur elle, qui la buvait du regard, et elle lui sourit tout doucement.


"J’ai faim !", avait dit Natalie. Serge s’était alors levé dans le contre-jour, et elle l’avait trouvé si beau qu’elle en avait eu comme un coup au cœur. Il avait à peine touché au déjeuner, trop occupé à la regarder manger gloutonnement, le menton maculé de miettes, le cheveu en bataille, les yeux rieurs. Il ne voulait pas qu’elle parte. Rien qu’à l’idée qu’ils se quittent, elle lui manquait déjà.


Il l’emmena à Lorient, où il avait un bateau. Après quatre heures de route, ils firent halte à Port-Louis. Le temps était gris encore, un peu frais, et la plage quasi déserte, mais Natalie se déshabilla très vite et courut dans l’eau, pendant que Serge se tenait frileusement au bord. Il aimait déjà les creux et les bosses de cette jeune fille toute en jambes qui riait de froid dans l’Océan.


Le bateau était amarré au port de Sainte Catherine, à Locmiquélic. Serge marchait à grandes enjambées devant Natalie qui peinait à le suivre, désorientée par l’élasticité du ponton. Au début, elle fut un peu déçue : c’était un voilier d’une huitaine de mètres, en métal, aux voiles repliées, recouvert d’une bâche jaunie, aux flancs protégés par des bouées oranges qui lui firent vaguement penser à de grosses saucisses.


"C’est des pare battage, lui dit Serge, ça protège la coque des chocs." Il retira la bâche : le pont du voilier apparut, recouvert de bois. Elle trouva ça joli, mais elle ne pouvait pas savoir quels efforts avait coûté à Serge cette fantaisie qui avait attiré les réflexions amusées de ses amis, qui avaient moqué la pure gratuité de ce travail. Lui était fier de son pont et de ce bateau qu’il avait réussi à remettre à flot.

Elle visita l’intérieur, surprise par son atmosphère chaleureuse et l’ordre qui y régnait. Chaque chose avait sa place, et tout l’espace disponible était utilisé. La première cabine était vouée  la navigation, et les deux petites pièces du fond avaient été transformées en une sorte de petit appartement où Serge venait vivre dès qu’il le pouvait. Elle constata avec surprise qu’il était équipé de matériel informatique dernier cri, notamment d’un fax et d’une valise satellitaire dont elle pensa qu’ils servaient d’instruments de navigation.


"Un compas, une boussole, des cartes, c’est déjà pas mal, lui répondit Serge. L’informatique, c’est pour mes traductions… Ça me permet de travailler ici, et de prendre la mer le plus souvent possible. Mais ça prend beaucoup de place…


- Ça a dû te coûter une petite fortune, non ?


- Un peu, oui. Si je pouvais m’en passer… Maintenant que je suis équipé, je vais pouvoir lâcher le studio de Paris !"


Natalie ne répondit rien. Elle pensait : c’est loin, la Bretagne…


Elle se cogna la tête plus d’une fois au plafond bas du rouf, se prit les pieds dans les bouts, gêna les manœuvres de Serge qui tâchait de sortir du pont à la voile. Elle finit par s’asseoir dans le seul espace libre, à l’arrière. Elle se sentit alors inutile et déplacée – elle aurait bien voulu l’aider, mais elle ne comprenait rien à tous ces cordages.

A côté d’elle, Serge tenait la barre, et l’écoute prise dans des sortes d’enrouleurs, tirait des bords en faisant passer le génois d’un côté à l’autre à l’avant du bateau, lui indiquait une île, devant eux, puis une forteresse, parlait de sens du vent… Bientôt, il lui tendit le cordage rouge qui maintenait le génois :


"J’ai besoin de ton aide, maintenant. Quand je dis « Paré à virer ! », tu relâches du côté tendu, et tu enroules de l’autre pour tendre la voile, le plus vite possible. Compris ?"


Natalie fit de son mieux. La corde rouge filait entre les anneaux, le génois passait en claquant ; après quelques essais malhabiles, qu’il corrigeait, elle se prit au jeu. Le bateau filait dans la rade, dépassait l’île Saint-Michel, le soleil perçait enfin, le vent sifflait, mais elle n’avait plus froid. Serge lui souriait.


Ils passèrent deux jours en pleine mer, à s’aimer dans la petite cabine du fond, à se cogner la tête au plafond bas et à en rire, à réinventer les gestes de l’amour, à user et abuser d’eux-mêmes.


Le surlendemain, Natalie rentra seule à Paris. Son travail l’attendait, sa vie enfin, qu’elle reprit en sentant encore les mains de Serge sur elle, dans l’état bienheureux des débuts.




3ème épisode


Ils se virent beaucoup au cours des deux mois suivants. Serge travaillait d’arrache-pied à des traductions de gastronomie russe et de manuels de pilotage pour l’Aéroflot, et se libérait autant que possible pour accueillir sa belle. Traduisant le jour, aimant la nuit, bricolant sur son bateau – Natalie se demandait ce qu’il pouvait bien encore trouver à y ajouter -, il dormait peu, et maigrit encore. Elle l’aidait comme elle pouvait, rabotait, clouait, vissait, s’abîmant les mains… N’importe, elle était avec lui, qui se montrait ravi de l’intérêt qu’elle portait à sa vie lorientaise.


Un beau jour, il décida de partir faire le tour du monde. Projet fou et égoïste, qu’il tempéra en proposant à Natalie de l’accompagner. Mais cette dernière était trop fine pour ne pas voir qu’une telle aventure se fait en solitaire. Elle l’aurait gêné. Elle se serait ennuyée. Ils auraient fini par se détester.


Le dernier jour, il vérifia le contenu des caisses qu’il emportait avec lui. Il contrôlait tout, méthodiquement, avec un soin maniaque qu’elle ne lui connaissait pas. Elle lui fit cadeau de deux livres qu’elle aimait. Il lui souriait, l’enlaçait rapidement en lui disant qu’il était content qu’elle soit là, mais il était déjà loin, dans un monde dont elle ne faisait pas partie ; c’était un autre homme et elle le regardait faire, assise sur une caisse, sans l’aider, impuissante, épouvantée déjà par l’idée de l’absence à venir.


Elle resta avec le groupe pour le saluer, le regarder qui sortait du port. Elle ravalait ses larmes pour l’après, elle s’en voulait d’être restée pour le départ, elle avait toujours détesté les adieux. Ensuite, quand elle fut enfin seule, elle erra dans l’atelier où les membres de « Jeunesse et Marine » entreposaient leur matériel et les bateaux dont ils repeignaient la coque, où elle avait tant de fois retrouvé Serge. Parmi les cordages, dans un coin, elle trouva une malle métallique. A l’intérieur était rangée la valise satellitaire.


Pendant trois mois, elle vécut au rythme des lettres et des coups de téléphone de Majorque, de Malte ou d’ailleurs, et ses amis s’alarmèrent avec elle au moindre bulletin de la météo marine. Elle avait rejoint Paris, et meublait le vide en reprenant des cours de danse, célibataire à nouveau, ou femme de marin attendant son Yann d’Islande, selon l’humeur du jour ; si elle se haïssait parfois de n’être pas partie avec lui, quelquefois aussi elle se sentit soulagée de la place que lui laissait cet amour exigeant parti loin d’elle. Au bout de trois mois, Natalie reprenait ses marques.


Et puis enfin, il y eut deux semaines de silence. Serge avait bataillé ferme contre une tempête qui avait brisé son mât, mais le cyclone Amelia eut raison de sa ténacité. Il fit naufrage au large des côtes brésiliennes. Un sardinier le recueillit, le réchauffa, le nourrit et, tandis que le bateau rentrait au pays, Serge, enveloppé dans une couverture, se disait que la route n’en finissait pas.


Cette même nuit, Natalie dansait, aux accents langoureux et mélancoliques du tango argentin. Son cavalier la guidait en des figures complexes qu’elle avait appris à maîtriser. Elle pensa un instant à Serge, à ses mains sur elle, le premier soir. Puis le bandonéon se fit plus sec, incisif, ils se mirent à tourner plus vite encore, elle se dit qu’il y avait beaucoup de bons danseurs, alors qu’est-ce que ça pouvait bien faire, elle n’avait qu’à suivre le rythme de la musique, passer dans d’autres bras, s’étourdir, de toute façon, elle pouvait bien s’arrêter, ça n’empêcherait pas la Terre de tourner.


Serge s’endormit, en pensant aux longues jambes de Natalie.